La vie de combats, de souffrances et de sacrifices de Seyyed Ali Khamene'i

(Cette note autobiographique a été écrite par Ali Khamene'i en 1984)

«Je suis né en 1939 dans la ville sainte de Mechhed. J'ai commencé mes études de théologie après être sorti de l'école primaire. J'ai passé les stades élémentaires du cycle d'études religieuses, et ai suivi, au sein du programme d'études islamiques, les cours de littérature Arabe, de théologie, de tradition coranique, de logique et de jurisprudence, niveau supérieur, au centre théologique de Mechhed. Au nombre de mes maîtres, j'ai compté Cheikh Hachim el-Qazvini et l'Ayatollah Milani. Après quoi, j'ai été m'établir à Nadjaf, en Irak.

En dépit de la fascination que je ressentais pour l'enseignement superbe dispensé au centre théologique de Nadjaf , pour les cours de Grands Ayatollah comme le défunt Mohsen el-Hakim, de Seyyed el-Kho'i, et Seyyed el-Shahrudi, et de Cheikhs comme el-Zanjani, el-Bijnawardi, dont j'ai immensément profité durant mon court séjour, j'ai du retourner en Iran pour des raisons familiales.

Début 1958, je me suis établi dans la sainte cité de Qom, et ai suivi l'enseignement de Grands Ayatollah, aujourd'hui défunts, comme el-Boroudjerdi et el-Ha'iri, et de l'Imam Khomeini. Là, sous la direction de ces enseignants renommés, mes études supérieures ont porté sur la jurisprudence, la logique et la philosophie. J'en suis reparti en 1964, pour revenir dans la ville sainte de Mechhed. Mais en 1962 éclata le grand soulèvement islamique contre le régime corrompu des Pahlevi, dont le centre théologique de Qom fut le foyer. je fus alors entraîné par ce mouvement : déjà mon coeur et mon âme débordaient d'idées révolutionnaires-islamiques, et ce soulèvement était pour moi le moyen de concrétiser cet idéal. A ce moment, ma vie a pris un tour nouveau. En plus de mes activités parmi la jeunesse combattante du centre, l'Imam de l'Oumma (R. Khomeini, NDT) me chargea de porter des messages à l'Ayatollah el-Milani et aux Uléma du Khorasan sur la lutte des peuples musulmans d'Iran contre la dictature du Chah. C'était durant le mois de Moharram 1963. Je me suis aussi rendu à Birjand pour mobiliser les masses contre le régime corrompu. A ce moment-là, le soulèvement s'étendait à tout le pays.

J'ai été arrêté pour la première fois à Birjand par les sbires du Chah durant les jours sanglants de Moharram. On m'a mis les menottes, et envoyé à la prison centrale de Mechhed. A ma libération, je suis retourné à Qom. Vers la fin 63, l'Imam m'a envoyé à Zahedan, pour une mission identique. Après y avoir fait plusieurs discours mobilisateurs dénonçant la vraie nature du régime du Chah, j'ai été à nouveau arrêté, ce qui a mis fin à ma mission. Cette fois-ci, j'ai été conduit à Téhéran et incarcéré dans la prison de Qazal Qal'ah. En 1964, en compagnie de plusieurs diplômés et enseignants de Qom, j'ai envisagé l'organisation de rassemblements politiques islamiques, et la création d'une organisation politique clandestine. Mais la police du Chah a poursuivi sa répression, et certains de nos amis, parmi lesquels les Ayatollah Montazeri et Rabbani ont été arrêtés, en compagnie de nombre de nos frères. Je suis passé dans la clandestinité pour un an environ.

Je suis revenu à Mechhed en 1964. A partir de là jusqu'en 1967, en plus de mon enseignement supérieur de théologie et d'exégèse du Coran, j'ai organisé le travail politique et idéologique dans le Centre et dans la communauté de Mechhed. Cette tâche incluait la mobilisation des religieux combattants, qui, à leut tour, incitaient le peuple à la lutte contre le Chah corrompu et ses laquais

et prêchaient la Révolution Islamique dans toute la ville. C'est en fait mon travail qui a déclenché l'agitation révolutionnaire à Mechhed, cette année là et toutes les suivantes.

Mes grandes conférences sur le Glorieux Coran, à Téhéran et dans d'autres cités, faisaient salle comble, ce qui, à l'époque n'était pas fréquent. Ces conférences, et les brochures que je publiais, m'ont valu la prison à de nombreuses reprises entre 1967 et 1970. La lutte armée contre le régime du Chah débuta en 1969. La répression de l'ancien régime (en français dans le texte, NDT) s'accrut, notamment contre moi, car les autorités étaient convaincues que je jouais un rôle dans cette affaire. J'ai donc été arrêté pour la cinquième fois. Les agressions, les coups des larbins de la Savak nous ont convaincus que le pouvoir et le Chah étaient profondément inquiets des liens qu'ils entrevoyaient entre la lutte armée et les centres d'opposition religieuse au régime. Les autorités rejetèrent mes explications selon lesquelles mes sermons et autres activités politiques à Mechhed n'avaient aucun rapport avec la lutte armée.

Après ma libération, j'accrus encore le nombre de mes conférences clandestines sur le Coran et la Révolution Islamique. Entre 1971 et 1974, l'activisme islamique et la lutte clandestine se menaient à Mechhed à partir de trois mosquées; el-Karamah, el-Hassan et Mirza Ja'afar. Chaque semaine, ces conférences informaient des milliers de personnes sur la pensée Révolutionnaire Islamique; les préparaient au combat et au sacrifice pour la cause de l'Islam. Voilà pourquoi ces bastions étaient en butte aux attaques de la Savak. Nombreuses étaient les arrestations de ceux qui organisaient ces réunions, ou bien y participaient. La fermeture de nos mosquées eut pour effet d'éveiller l'intelligentsia Islamique et les jeunes révolutionnaires de Mechhed. Cela me permit de multiplier les réunions plus restreintes et plus spécialisées et d'insuffler l'esprit révolutionnaire à la jeunesse, dans une ambiance plus sûre et plus libre. Cela me permit également d'élargir le cercle de mes activités à d'autres villes de la province de Khorasan, et même au-delà.

Durant ces années, mes étudiants et diplômés en théologie se dispersèrent pour se fixer dans de nombreuses villes, et cela fit que notre mouvement sacré se répandit encore plus loin. C'est alors que j'entrepris une des plus importantes de mes séries de conférences, sur le thème du Nadj el-Balagha («Les sommets de l'éloquence» : une compilation des _uvres de l'Imam Ali, sous forme d'un livre. NDT). C'était un programme d'enseignement étendu, dispensé chaque semaine à la mosquée El-Hassan à Mechhed, qui devint bientôt l'axe de l'entreprise révolutionnaire dans cette ville. Les pensées de l'Imam Ali y étaient exposées et expliquées. Ces conférences étaient ensuite retranscrites et polycopiées au Centre, puis distribuées au peuple de cette cité militante, à qui elles apportaient une lueur d'espoir.

L'année 1974 fut très dure. La Savak de Mechhed ne pouvait tolérer que notre grand centre Islamique (la mosquée de l'Imam Hassan, NDT) serve de foyer de propagande Islamique Révolutionnaire, et cherchait à se débarrasser de nous. Je fus convoqué à plusieurs reprises dans les bureaux de la Savak et menacé. Des espions me surveillaient sans cesse, de ma maison à la mosquée, et vice-versa. Nombre de mes proches, qui organisaient avec moi ces conférences d'information politique, furent arrêtés. La Savak se doutait également qu'il existait un lien entre mes conférences et mes activités politiques clandestines. Je m'efforçai de couper tous les liens qui me rattachaient à mes amis, pour ne pas les compromettre quand finalement, en décembre 1974, la Savak prit ma maison d'assaut, m'arrêta et s'empara de tous mes écrits. J'en étais à ma sixième arrestation, et celle la fut parmi les plus dures. Je fus expédié à Téhéran et incarcéré dans des locaux de la Savak, à l'état-major de la police. Là je restai dans le noir, durant une période assez longue, dans une situation très précaire. Ils m'interrogeaient de la façon la plus brutale, me maltraitaient parfois jusqu'à l'épuisement. Il faut avoir vécu de telles situations pour se les imaginer vraiment.
Depuis 1971, la Savak était totalement persuadée de mes liens avec la lutte armée clandestine qui se développait dans le pays, et de mon rôle d'activiste et d'organisateur. Rien ne put les faire changer d'avis : ils me maltraitèrent et me torturèrent de la façon la plus cruelle. Quand je fus libéré, en 1975, je revins à Mechhed et repris le cours de mes conférences, mais ne pus poursuivre le programme de réunions publiques dans la mosquée el-Hassan. Qui plus est, depuis deux ans, j'étais sous le coup d'une interdiction de sortie du territoire. Simultanément, pendant toute cette période, et cela reste un très bon souvenir, j'organisai au Centre des conférences secrètes sur l'Islam pour les jeunes, un groupe d'étudiants combattants qui firent beaucoup pour imprégner notre Centre de l'esprit Révolutionnaire Islamique et furent ultérieurement très actifs durant la Révolution.

En 1977, avec un groupe d'érudits et de frères de Téhéran, j'entrepris de donner à la ligue des Uléma combattants une ampleur nationale. C'était le premier pas vers la constitution du Parti de la République Islamique. A la fin de cette année, je fus arrêté, torturé une fois encore et exilé pour une période de trois ans dans la ville d'Iranshahr, dans le sud du pays. Je fus libéré à la mi-1978 sous la pression du mouvement populaire qui s'amplifiait contre l'ancien régime. Je retournai alors à Mechhed et y conduisit la lutte de la population. A la fin janvier 1978, je fus nommé au Conseil Révolutionnaire Islamique (CRI) par l'Imam (Khomeini, NDT); cela me fut transmis par les Ahatollah Motahhari (martyr) et Montazeri. En février 1978, en compagnie de quatre de mes frères d'armes, j'annonçai la création du Parti de la République Islamique (PRI). Après quoi j'exerçai les responsabilités suivantes :

. Membre du comité central du PRI (1979)

. Secrétaire général du ministère de la défense, et représentant du CRI en son sein (décembre 1979),

. Commandant des Pasdaran (décembre 1979), et

. Imam de la prière du Vendredi à Téhéran (Janvier 1980).

J'ai commencé à écrire en 1963 et j'ai écrit, et traduit, un certain nombre d'ouvrages, au nombre desquels ont été publiés

. «Conciliation de l'Imam Hassan» ,

. « Le rôle des Musulmans dans la libération de l'Inde» ,

. « Traîté de la patience»,

. «L'avenir de la religion musulmane»,

. « Les profondeurs de la prière»,

. «Les grandes orientations de la pensée islamique, selon le Glorieux Coran»,

. «L'action politique de l'Imam el-Sadiq» ,

. «Contre la civilisation occidentale»,

. «Les enseignements majeurs de l'Islam et des autres religions».

Elements biographiques complémentaires

- Juin 1981 : grièvement blessé par un radio-cassette piégé par des «Moujahidin du Peuple»; il perd l'usage du bras droit,
- Octobre 1981 : élu président de la République islamique,
- Août 1985 : réélu président de la R. I.,

Devient « guide et jurisconsulte» après le décès de l'Imam Khomeini en juin 1989,

L'Imam Ali Khamene'i est marié et a six enfants. il parle couramment l'Arabe et l'Azeri (turc)

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