QUE NOUS APPRENNENT LES ARCHIVES DU "GROUPE OLIVIER" D'ACTION DIRECTE ?

Xavier Raufer

I - QU'EST-CE-QUE LE GROUPE OLIVIER ?

C'est un noyau communiste combattant qui se crée à partir des années 68-69, autour d'un individu - pivot qui "construit, élabore, programme".

[Les passages entre guillemets et en italiques proviennent de textes écrits par Olivier ou ses camarades]

Au cours de sa préhistoire (68-77) le groupe connaît une alternance classique d'épisodes militants ""à ciel ouvert" et d'activités violentes illégales9.
Constitué en une unité clandestine vouée à la guérilla urbaine à partir de 1977-78, il se structure en un groupe central de 5 à 6 individus, groupe qui fait preuve d'une certaine stabilité, mais connaît, à deux exceptions près, une rotation assez lente ; et un environnement de sympathisants, en moyenne deux fois plus nombreux (+/- 10, 12).

Au total, sur une décennie (1975-85) ce sont une trentaine d'individus qui composent la mouvance étroite du groupe Olivier (militants actifs ou sympathisants proches, avertis de la nature des activités du groupe).
On y trouve deux tiers d'hommes, un tiers de femmes, en général de nationalité française et métropolitains. On note la présence de quelques antillais.

Le groupe se livre à deux types d'activités complémentaires, l'une alimentant l'autre :

La fin: activités politiques

Elles sont signées dans un premier temps Affiche Rouge sur la région lyonnaise, puis Action directe sur la région parisienne. Le projet Affiche Rouge permet une ' politisation des actions de financement". Il est conçu "dans le but de nous désencercler, pour que l'on puisse continuer à fonctionner après le deuxième accroc ".10

Le moyen : "activités de financement"

I1 s'agit d'attaques à main armée d'établissements de type bancaire, réalisées dans la région lyonnaise. La première d'entre elles a lieu peu après la manifestation antinucléaire violente de Creys-Malville, en 1977.
 
Activités connues Réussies Ratées total
Financières 12 9 21
Politiques 10 2 12

Notons qu'aucune de ces 33 opérations n'a donné lieu à la moindre interpellation, ni sur le moment, ni ultérieurement, avant mars 1986.

Le Groupe Olivier n'est pas isolé. Bel et bien "fermé à la police"11 pendant une décennie il a, même s'il n'est pas "ouvert aux masses", des contacts politiques réguliers avec des noyaux homologues sur tout le territoire.

* Contacts réguliers avec un "groupe parisien" dès +/- 1976 et jusqu'en 1985,
* Rencontre avec un groupe "dans le Nord" en +/- 1977-78,
* Contacts réguliers avec "un groupe Antillais" à partir de +/- 1982,
* Rencontre avec des militants "dans le Sud" en 1985.

II - LE GROUPE OLIVIER, GROUPE COMMUNISTE COMBATTANT

Une fois de plus, l'étude de documents concrets et de sources originales montre -au point d'en être lassant-. la répétition classique du modèle communiste combattant.

* Division des effectifs d'un noyau armé entre un doctrinaire / organisateur et des hommes d'action finalement dépolitisés12,

* Premiers contacts, dans le secondaire, entre éléments juvéniles admirant éperdument un militant plus âgé qu'eux et engagé dans "un mouvement prolétarien" (comparable à des dizaines de récits de déroulement de "carrières combattantes" en Italie, en RFA, en Espagne, etc. Voir en particulier le cas de Pio Moa, "dissocié" de la direction des GRAPO).

* Parcours contestataire classique militantisme ouvert, diffusion de propagande révolutionnaire, - épisodes de vie en communauté (voir le cas de "Kommune I" et de "Kommune II" dans la préhistoire de la RAF),

* Tentatives utopiques de types Maoïstes ("Servir le Peuple") : campagnes de gratuité des transports pour les chômeurs, troupes de théâtre, etc. (voir les cas du Collectif métropolitain de Curcio à Milan, et les crèches dans la phase pré-terroriste de la RAF).

* Embauches de type "établissement" dans de grandes entreprises, et renvois ultérieurs,

* Premières activités teintées d'illégalisme,

* Premiers accrocs avec les instances de répression,

* Opérations militantes illégales, violentes mais "au grand jour" menées de front avec une activité salariée de plus en plus épisodique,

* Ultimes tentatives d'activité lucrative légale, pas même concrétisées,

* Première "entreprise de financement",

* Découverte de la contradiction (notamment en cas de vie de couple) entre l'action illégale grave, de type attentat ou attaque à main armée, et la vie non clandestine (voir notamment les tracas d'un militant Italien du Parti Armé confronté à une expérience semblable dans "Giorgio, profession
terroriste" Ed. Mazarine 1983).

* Constitution d'un groupe voué à la lutte armée : "Un groupe collectif parlant en vue de réaliser des actions ",
* A la 2° ou 3° "opération de financement", une bavure contraint le groupe central à passer à la clandestinité totale,

* Alternance, jusqu'au démantèlement final, d'"opérations de financement" et d'"opérations politiques".

III - PROFIL D'UN MILITANT ACTIF DU GROUPE OLIVIER

Le militant suit un chef, qui décide. Ses écrits montrent une inculture politique profonde. Il emploie (dans la "confession de 29 pages", par ailleurs truffée de fautes grossières) quelques mots mythiques :

COMMUNISME : "C'est un homme extrêmement généreux et sincère : un communiste en somme ".

SOVIETS : "Partir en URSS. Ca fait un voyage... Autant travailler pour eux ".

FASCISME : "Comme les fascistes qui posent une bombe dans les lieux publics populaires " (sic)

CAPITALISME : "Le monde capitaliste mène à l'impasse : individualisme total avec tranquilisants, plus de rapports humains (...) il veut la guerre, fait la guerre, extermine par la faim ".

Dans son univers manichéiste et simplet, les psychologues sont des flics : "Un travail de psychologue (auxiliaire de la police) ; "Il est vital de lutter contre les riches ". Le seul mythe positif un peu fort est celui du guérillero communiste : présence d'allusions au groupe Manouchian, d'où la dénomination du groupe (Affiche Rouge).

Au total, le tableau est celui d'un homme de main pour qui l'action est une drogue, dont les motivations politiques, construites autour des pôles Anti-impérialisme - Anti-capitalisme - Anti-racisme - Anti-fascisme, sont en dernière analyse de purs prétextes.

Assez déshumanisé (l'assassinat du témoin d'un hold-up est qualifié d'"incident"), il n'échappe pas malgré tout à la mauvaise conscience : "Je drague, alors que le l'autre côté des flots (Maghreb ? Palestine ?) des milliers d'individus meurent ".

IV - LE FONCTIONNEMENT DU GROUPE OLIVIER EN 16 POINTS.

(Méthodologie de la vie clandestine de A à Z)

1 - APPARTEMENTS: voir le chapitre 7, "Problème des appartements et bases logistiques".

2 - ARMES ET EXPLOSIFS: Achetés à des criminels de droit commun. Entretenus et testés. Rangés après avoir été répertoriés, dans des bases opérationnelles.

3 -ATTENTATS : Exécutés surtout sur la région parisienne (voir le point 16 "Zone d'activité politique"). Ils se font à partir d'une base opérationnelle et sont précédés de repérages. Ils sont exécutés en phase finale par un individu isolé, récupéré, après le dépôt des explosifs, par un complice à bord d'un véhicule "illégal". (Voir également le paragraphe "véhicules", dans le chapitre 5, "Opérations de financement"). La revendication se fait par un bombage à la peinture sur un mur proche, et envoi d'un communiqué (qui peut aussi être dicté à une agence de presse).

4 - BASE D'ACTION : La région lyonnaise, où l'on vit en général, et où l'on organise toutes les opérations de financement (les plus risquées dans le cas de ce groupe, qui limite ses actions politiques à de la "Propagande armée").

5 - BAVURES : En cas d'"accroc" ou d'"incident", il est prévu une séance de debriefing, ou d'autocritique.

6 - DÉPLACEMENTS : Avant d'aller d'un point A à un point B, on discute et on adopte un itinéraire sur un plan dont les deux éléments possèdent un exemplaire identique. II est interdit par la suite -sauf catastrophe- d'en changer, afin d'éviter des manoeuvres acrobatiques, visibles par des témoins. Même pour déplacer un véhicule d'un endroit à un autre, il faut une voiture suiveuse.

Les véhicules doivent toujours se déplacer en tandem, afin de se surveiller et de se "couvrir" mutuellement.

Avant qu'un militant actif ne se rende à un endroit donné, un élément sûr procède à une visite de sécurité préalable.

7 - DIRECTION : Le responsable du groupe, qui "sort rarement ", prépare avec minutie les actions, tient en général les "check list", planifie l'activité de l'organisation, et centralise la collecte du renseignement. A un niveau plus extérieur, c'est également lui qui est en contact avec les autres groupes ; il "connaît tant de militants précieux àfréquenter dans notre situation" et organise éventuellement des contacts avec des "étrangers". ("Un militant qui se battait pour son pays

8 - DISCIPLINE: Théoriquement, il faut demander une autorisation au responsable avant de voir des personnes extérieures au groupe, même des "anciens" ou des sympathisants.

9 - FINANCES : Les propositions d'action financière peuvent émaner du sommet ou de la base. On "procède par enquêtes" (expression Maoïste classique) et par critiques croisées. (Voir aussi le chapitre 5 "Activités de financement").

10 - MODE DE VIE : Les éléments "terrain" doivent de préférence vivre par couples. En été et à Noël, ils partent en vacances (en Espagne, ou à la montagne, dans un chalet). C'est là que les besoins d'argent sont les plus importants : "Pour l'organisation, deux échéances sont vitales : l'été et Noël ".

11 - OPÉRATIONS : Elles ont, de l'avis des intéressés eux-mêmes, un bon niveau technique : "Le travail fait au sein du groupe n'est pas le bagne. On prend des "risques" (limités, calculés par X au point que jusqu'à présent rien ne s'est passé pour personne - une telle sécurité n'existe nulle part ailleurs) ". Cette dernière phrase semble impliquer la connaissance, par l'auteur, de hold-up "politiques" faits par d'autres groupes et où les choses se passent moins bien.

Les opérations de type gestionnaires (location d'appartements, etc.) donnent lieu, à chaque fois, à la rédaction d'un compte-rendu.

12 - PAPIERS (faux) : A partir d'un stock limité de vrais permis de conduire et CNI récupérés auprès des sympathisants, l'expert du groupe a la capacité de procéder à des échanges de photographies et à l'apposition de nouveaux tampons secs. Le clandestin a alors sur lui une vraie/fausse CNI, appartenant à un autre individu, grosso modo comparable, complice ou non.

13 - SÉCURITÉ : En dehors de toutes les précautions décrites dans ce texte, le Groupe Olivier :

* Ne communique jamais directement par téléphone, mais fait usage d'intermédiaires comme "coupe-circuits",

* fait toutes ses communications un peu longues ou un peu précises par écrit, le pli étant porté par un élément sûr,

* fait une distinction très nette entre base opérationnelle et appartements d'habitation. Dans ces derniers, en cas de pépin, rien de compromettant n'est stocké,

* fixe ses rendez-vous avec des fourchettes de sécurité de 15 minutes. L'heure passée, on "décroche".

14 - DIVISION DES TACHES : Elle existe, du moins en théorie. Tous les "postes" ne sont pas toujours pourvus, et chacun tend à avoir plusieurs spécialités. On trouve :

* un spécialiste de la logistique mobilière, qui gère voitures et matériel, armes et explosifs, faux papiers,

* un spécialiste de la logistique immobilière qui gère les appartements et garages (tâche ingrate, où les rotations sont fréquentes),

* un gestionnaire des archives,

* des collecteurs de renseignement,

* des éléments action.

15 - VÉHICULES : voir dans ce chapitre "déplacements", et le paragraphe "véhicules" dans le chapitre 5 "Opérations de financement".

16 - ZONE D'ACTIVITÉ POLITIQUE Paris. Des éléments peu nombreux du groupe (2 à 3 personnes) y font des séjours fréquents à partir de 1982 ; ils y disposent de bases, sous forme d'appartements et de garages.

V - LES OPÉRATIONS DE FINANCEMENT: MÉTHODOLOGIE ET DÉROULEMENT CHRONOLOGIQUE

Ce qui suit est la théorie du hold-up selon le groupe Olivier. Bien entendu, dans la pratique, on adapte, on oublie sa leçon, parfois on s'affole. Gardons cependant en mémoire le fait que réussies ou "ratées", les 21 attaques à main armée (connues) du groupe n'ont jamais donné lieu à la moindre arrestation. Il s'agit donc d'une méthode qui réussit 57 fois sur 100, chiffre qu'il serait intéressant dé comparer à ceux, vérifiables, d'équipes issues du grand banditisme.

· DONNÉES GÉNÉRALES
Les opérations sont généralement , des "hold-up" classiques. Parfois, on constate l'usage d'explosifs, pour faire sauter la porte d'un établissement donné, en dehors des heures d'ouverture au public. Dans ce cas, le but est de "récupérer le sac (...) derrière le comptoir lequel, en général, n'est pas "emporté à la salle des coffres ".

Les actions sont commises sur un "territoire de chasse" bien balisé : la région Lyon - Saint-Etienne.

· LA COLLECTE DU RENSEIGNEMENT

Pour mener une opération financière, divers éléments sont indispensables : "précision du renseignement, connaissance exacte de l'intérieur (de l'établissement-cible) non-improvisation ".

On commence par observer "plusieurs établissements de la même marque au même moment " pour éliminer les aléas et découvrir les rythmes utiles, puis on vérifie l'heure de passage des patrouilles de police, leur régularité, etc.

Des reconnaissances sur le terrain sont faites (avec prise de notes) sur les passages (nombreux à Lyon), et sur les trajets d'approche et de départ de l'objectif. Si, au cours de la préparation sur plan d'une opération, un détail cloche, on arrête, on envoie une personne sûre vérifier, et on recommence par la suite, en possession du renseignement correct. Enfin, on observe avec minutie les "livraisons "(sans doute des fonds par les convoyeurs), pour un établissement donné, deux observations au minimum sont prévues.

· PRÉPARATION CONCRÈTE

On commence par choisir, au sein des opérationnels, qui participera à faction, et dans quel rôle. Dans le cas du Groupe Olivier les actions sur le terrain impliquent de 2 à 4 personnes dont, parfois, des femmes.
Puis on élabore un scénario au cours d'une discussion, plans en main. Ce "briefing" peut durer plusieurs heures.

Il existe un "check-list" de préparation technique :

* Liste des papiers divers à distribuer à chacun,

* Pièces de monnaie pour les parc-mètres,

* essai des armes, rangées dans des bases logistiques, "Dans des valises fermées à clé ",

* préparation des explosifs qui, en cas de besoin, doivent être testés avant l'action,

* les tenues doivent être préparées et essayées à l'avance,

* préparation du matériel servant à modifier l'aspect physique,

* préparation et essai du matériel d'écoute et de liaison (Scanners, talkie-walkies).

· LES VÉHICULES

L'attaque à main armée nécessite un parc automobile sophistiqué et complexe :

* des mobylettes qui sont en temps ordinaire rangées dans un garage (et vérifiées avant emploi),

* une voiture "officielle", ou "légale", équipée d'un scanner et d'un talkie-walkie, (Après un hold-up, l'auteur de la "confession de 29 pages" écrit: "je m'aperçois qu'on donne beaucoup de détails à mon sujet ", en écoutant la fréquence de la police). Cette voiture "officielle" est achetée ou louée.

* Une voiture "d'intervention", qui a été "récupérée" et conservée dans un garage, et dont les plaques ont été changées. Quand, après l'opération, le véhicule "légal" et d"' intervention" font leur jonction, ils émettent un signal spécifique. En dehors de cela, aucun contact n'est permis entre les deux véhicules (sortir de l'un pour aller parler avec les occupants de l'autre, par exemple) : cela matérialiserait, pour un éventuel témoin, le lien entre les deux voitures.

Avant l'heure H, tôt le matin, on assiste à la "mise de tous les véhicules en place".

· L'ACTION

Elle implique deux détachements :

* La base rapprochée,

* Les opérateurs.

La base rapprochée consiste en un véhicule, le "légal", garé en vue directe de l'objectif. A l'intérieur, une personne écoute le scanner et l'autre, munie du talkie-walkie peut prévenir les opérateurs et décider de la manoeuvre.

Les opérateurs arrivent à proximité des lieux en mobylette. Ils vont dans un endroit discret, repéré à l'avance, pour enfiler tenues et déguisements. Ceux-ci sont de type conventionnel (perruque, lunettes, casquette parfois), pour pouvoir passer le cap du sas. Les exécutants doivent être sur les lieux 15 minutes avant l'heure H.

A l'heure convenue, ils pénètrent dans l'établissement, enfilent une cagoule et annoncent la couleur. De leur propre chef (alarme, résistance farouche d'un employé) ou sur message du talkie-walkie, ils peuvent "décrocher" à chaque instant.

En sortant, ils sont récupérés par le véhicule illégal, (voitures "légale" et "illégale" se suivent, en respectant scrupuleusement l'itinéraire prévu) parviennent au rendez-vous convenu, puis rejoignent leur base à bord du véhicule "légal". Une variante est possible, qui autorise les opérateurs à abandonner tenues et équipements dans un lieu discret, à proximité de la banque, avant de rejoindre leur voiture.

VI - CIBLES INTÉRESSANT LE GROUPE OLIVIER

I1 s'agit d'un balayage très large de personnalités et d'institutions dont (attaque démontrerait symboliquement le sens de la lutte d'Action directe.

La première "cueillette" est visiblement effectuée par le biais de sources "ouvertes"
presse, annuaires spécialisés. Certaines personnalités bien précises et certains secteurs militaires particuliers ont fait l'objet d'un travail de surveillance et de renseignement plus approfondi. On dénombre, aux total, 334 cibles potentielles (après élimination des doublons).

Par ordre d'intérêt décroissant

1 - CIBLES MILITAIRES ET DE RENSEIGNEMENT

Une vaste majorité de ces cibles sont de nature à "illustrer" une campagne de type anti-OTAN : "profils" comparables à ceux de l'Ingénieur général Audran, institutions s'occupant de haute technologie militaire, etc..

* Institutions : 19
* Personnalités : 130
TOTAL: 149

2 - CIBLES ÉCONOMIQUES

30 % à peu près de ces cibles sont des établissements ou des personnalités liés à des projets de haute technologie militaire de type (d'après eux) Eurêka ou IDS, à viser dans le cadre d'une campagne anti-OTAN.

* Établissements industriels ou de service, financier ou touristiques : 43
* Personnalités exerçant des responsabilités dans ces domaines : 49
TOTAL: 92

3 - CIBLES POLITIQUES

Personnalités de gauche : 10
Personnalités de droite : 19
Personnalités d'extrême droite : 3
Locaux de partis et d'associations : 4
Bâtiments officiels : 3
TOTAL: 36

4 - CIBLES LIÉES AU CONFLIT DU MOYEN-ORIENT

* "Sionistes" (Juifs ou Israéliens)
. Institutions : 3
. Personnalités : 24

* Américains et divers : 3
. Personnalités
TOTAL: 30

5 - CIBLES MÉDIATIQUES (Journalisme et culture)

. Établissements : 7
. Personnalités : 19
TOTAL: 26

6 -CIBLES RELIGIEUSES

. Personnalité : 1
TOTAL GÉNÉRAL : 334

VII - PROBLÈME DES APPARTEMENTS ET DES BASES LOGISTIQUES

Pour le responsable logistique du groupe, le problème des appartements et des planques est une véritable obsession "Chercher des appartements "... "Trouver des appartements ".. . "Location d'un appartement "... "Chercher une cachette "... "Harceler untel pour qu'il cherche des appartements '° (à deux reprises) : le mot appartement rythme et scande la "confession de 29 pages".

La lecture de ce texte nous montre que ce problème passe bien avant celui des armes et des explosifs, et est plus sérieux même que celui du nerf de la guerre : une bonne partie des "opérations de financement" est faite en vue de payer les loyers : "Les échéances pour payer les appartements étaient arrivées ". A plusieurs reprises, ils cherchent le moyen de "Prolonger la location ".

Le problème des appartements est crucial, car ceux-ci constituent d'indispensables bases d'action : "Nous n'avons pas d'appartement, par conséquent nous ne pouvons pas agir politiquement".

Comment le Groupe Olivier se tire-t-il de ce problème? Dans la période 1977-1985, il semble avoir la jouissance de t 15 appartements sur la région lyonnaise, de deux appartements (connus) sur Paris, de plusieurs lieux de villégiature ("Louer une villa pour l'été "... "Un chalet pour l'hiver ') et d'un nombre substantiel de garages.

Les appartements proviennent :

* soit de locations effectuées par des militants ou des sympathisants,
"Faire une location d'appartement" ... "fais d'autres locations ".

Ces locations doivent se faire en sachant : "diversifier les locataires ". Il faut se présenter en jouant : "le scénario du couple, la belle voiture ".

* Soit de prêts par des sympathisants ou des relations :

"je demande à untel (sympathisant) de me laisser son appartement ".
En général, le Groupe Olivier semble avoir disposé de plusieurs appartements et garages sur une période donnée "Ceux (appartements) que nous avions " ... "Ce garage là ".

Les appartements sont organisés en bases - vie, et approvisionnés de façon à permettre à un / des militants) de subsister quelques temps, en cas de danger, sans avoir à sortir : Il faut faire "Des achats de nourriture pour louer un appartement à Paris ".

VIII - PROBLÈMES NON RÉSOLUS ET POINTS TROUBLANTS

La lecture des "Documents Olivier" ne permet pas d'atteindre un niveau pleinement satisfaisant de compréhension du fonctionnement de cette Unité : si ces documents nous apprennent beaucoup, ils jettent également des lueurs troublantes sur des éléments de (histoire et des méthodes d'action du groupe.

· LE GROUPE OLIVIER COMME ELEMENT D'ACTION DIRECTE

Sur plusieurs années, des phrases elliptiques laissent supposer des difficultés à arriver à l'unité d'action avec d'autres parties prenantes du projet de lutte armée :

(Avant 1980)

"Voyage de X à P. On repousse ses propositions "

(Fin 1982)
"A.P. les autres avaient repoussé ses propositions, et (...) ses amis du Sud ne voulaient plus revenir

(1984-85)
"Bilan des actions, comme à l'habitude refus. On regarde la presse ".

D'après le contexte, les problèmes semblent moins politiques (il y a accord sur la notion de lutte armée, sur "l'analyse de la période", sur la nature même des cibles) que techniques.

A propos des cibles, constatons le nombre important d'objectifs civils et militaires anti-OTAN (36 % environ) proportion curieuse pour un élément de la soi-disant "branche nationale".

On sent, à la lecture de certains textes, une équipe soucieuse de faire la preuve de son efficacité, de son respect des règles de sécurité, de ses références en matière de guérilla urbaine, et qui n'arrive pas à s'imposer, à se faire prendre totalement au sérieux par ses "interlocuteurs" à "P" (Paris).

On comprend d'ailleurs un peu ces mystérieux interlocuteurs parisiens quand on constate que l'élaboration quasi-maniaque de règles de sécurité, la production de check-list exhaustives, vont de pair à certains moments avec des gamineries de type siphonnage d'essence dans des voitures en stationnement, larcins divers (nourriture dans des grandes surfaces) pour ne pas parler d'un cambriolage qui se termine par le vol de... boîtes de chocolat.

II semble que le Camarade Olivier ait connu un problème de type mussolinien, chef aux visions grandioses, mais que ses troupes ne suivaient pas toujours...

Le cas décrit ci-dessus n'est pas unique. Un groupe milanais de lutte armée a pu ainsi, en 1977-79, multiplier les actes meurtriers, dans l'espoir de retenir l'attention, puis de se faire intégrer dans la colonne locale des Brigades rouges (la redoutable "Walter Alasia") ; colonne qui leur opposera toujours un mépris hautain ...(Voir "Camarade P. 38", Grasset 1983)

· QUESTIONS TECHNIQUES EN SUSPENS

On peut se demander si, à un moment donné, le Groupe Olivier n'a pas effectué (sur quels objectifs ?) des écoutes téléphoniques ou acoustiques sauvages : il est question, dans un texte, de "relever les bandes magnétiques de la vieille". ("la vieille" sert à désigner une base opérationnelle).

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9 Voir chapitre 2 "Le groupe Olivier, groupe Communiste Combattant".

10 Hold-up qui s'est mal passé, où il y a eu "bavure".

11 Allusion au mot d'ordre de la Gauche prolétarienne "Construire une organisation ouverte aux masses et fermée à la police".

12 Voir le chapitre III, "Profil d'un militant actif du Groupe Olivier".