Difficile, par définition, d'obtenir une estimation chiffrée du montant des patrimoines occultes. En 1987, une équipe du Fonds Monétaire International publie le fruit de quatre années de recherches: le Rapport Esteva explore avec précision le "trou noir" des finances mondiales, un gap qui s'élevait en 1983 à 38,1 milliards de dollars. Dans l'hypothèse de placements à un taux de rendement de 6%, les patrimoines occultes correspondants peuvent être estimés à 635 milliards de dollars.

Le raisonnement est purement comptable. L'argent d'origine douteuse est placé dans des institutions financières peu regardantes: fonds fiduciaires offshore de paradis fiscaux par exemple. Par le biais des transferts bancaires, ces sommes peuvent être investies dans différents pays. Les centres offshore ont ainsi attirés des patrimoines substantiels dont les revenus investis à l'étranger sont bien enregistrés au débit de la balance des paiements du pays receveur mais pas au crédit de celui d'origine de ces fonds occultes. De même les dividendes et intérêts générés par ces placements sont-ils comptabilisés dans les pays d'accueil des investissements qui les versent, sans être crédités nulle part.

Les calculs actualisés du Rapport Esteva permettent de placer aujourd'hui l'estimation des patrimoines occultes dans une fourchette de 700 à 1000 milliards de dollars