Allégeances et alliances


Depuis sa fondation, le PKK entretient des liens privilégiés avec la Syrie de Hafez al-Assad; alliance illustrée par l'installation des chefs du PKK à Damas après le coup d'Etat en Turquie, en 1980, puis dans le Liban sous contrôle Syrien, en 1987. Du fait des promesses de Hafez al-Assad à Turgut Özal (alors premier ministre de Turquie) en 1987, ces liens se sont aujourd'hui un peu distendus.

De même, le PKK a-t-il toujours été en bons termes avec les autres mouvements (guérilla ou terrorisme) proches de Damas. Les Palestiniens tout d'abord : vers 1972-74, certains éléments du futur PKK collaborent avec le Commandement des Opérations Spéciales à l'Etranger du FPLP, dirigé par Wadi Haddad. C’est alors que de futurs membres du PKK et de l’Asala font connaissance. Le fait, ennuyeux, que le "“Kurdistan” historique" et l' "Arménie historique" se recouvrent à 70%, n'empêche pas le PKK de s'allier avec l'Asala, en avril 1980, au Liban. Cette curieuse entente perdure après l'opération militaire turque au nord de l'Irak, en mai 1983, permettant à l'Asala d’aguerrir ses hommes dans la "zone libérée-PKK".

En 1986-87, des sources sérieuses font état de contacts entre le PKK (toujours marxiste-léniniste) et la République islamique d'Iran. Au Liban, des contacts sont depuis lors fréquents entre cadres du PKK et du Hizballah; en octobre 1989, la presse turque dénonce violemment la présence de deux camps du PKK en Azerbaïdjan Iranien. Démentis vertueux, bien sûr, de Téhéran...

Restent les liens entre le PKK et Saddam Hussein. En septembre 1989, les rumeurs d’une alliance secrète PKK-régime irakien sont déjà suffisamment consistantes pour que le ministre des affaires étrangères irakien les “démentent catégoriquement”. Autre démenti de Tarek Aziz, vice premier ministre d'Irak en septembre 1991. Selon le PDK et l’UPK, le PKK renseignerait depuis 1988 Bagdad sur les autres partis kurdes, en échange d’argent et d'armes. En septembre 1990, Ocalan prend ouvertement parti pour Saddam Hussein qui “lutte contre l’impérialisme américain”. Option stratégique confirmée par l'un des chefs militaires du PKK qui déclare alors : “Pour nous, ce qui est important, c’est la révolution au Proche-orient et nous nous battrons aux côtés de quelqu’Etat ou force de la région qui soit d’inspiration révolutionnaire”. Avant d’ajouter que le PKK est en contact avec des militaires irakiens dans la région de Zakho depuis août 1990. Les rumeurs de livraison d’armes massives de Saddam au PKK s’amplifiant, Ocalan se justifie, au cours d’interviews accordées fin 1991 en prétendant que les armes ont été “abandonnées par l’armée irakienne” et récupérées par ses hommes.



PKK - Saddam : de lourdes présomptions
Le “New-York Times”, 20 octobre 1991
“Le gouvernement irakien arme et ravitaille les séparatistes kurdes dans le sud-est de la Turquie; sans doute pour se venger de l’étroite coopération entre Turcs et forces alliées durant la guerre du Golfe; disent des officiels turcs, des diplomates occidentaux et des dirigeants kurdes en Irak”.
“Kayhan” quotidien (islamiste) de Téhéran, 27/4/92)
Interview de Temer Ramadan Kucher, chef du PDK pour la ville de Zakho, au “Kurdistan” irakien : “Nous soupçonnons les autorités irakiennes de commettre des sabotages par le biais du PKK. il y a beaucoup de militants du PKK dans la région... Ils tiennent leurs fournitures et leurs renseignements de Bagdad”... “Le PKK a des bases près de Zakho. Certain de leurs responsables rendent visite à des dirigeants irakiens et ceux-ci les aident”.



Ainsi se dessine la stratégie régionale du PKK : ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier, jouer alternativement la Turquie, l'Irak, l’Iran et la Syrie les uns contre les autres. En matière de contacts douteux du PKK dans le bassin méditerranéen, ajoutons ceux qu’Abdallah Ocalan entretient avec Moammar Khadafi :

• 20 juin 1995, 23h. 15 G.M.T., “Voix de la Grande Nation Arabe”, Tripoli, Libye : “Dans un télégramme adressé au Frère Guide de la Révolution [Kadhafi] le frère Abdallah Ocalan, secrétaire général du PKK, a affirmé la totale solidarité du peuple kurde avec la grande Jamahiriyah, forteresse et phare du mouvement de libération arabe et islamique, victime d’un lâche complot impérialiste”. Une “fraternité” qui permet au PKK de racketter sans grande difficulté la (riche) communauté des immigrés kurdes en Libye.


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