A. Aborder les réseaux criminels comme systèmes

Contrairement à une enquête classique, un réseau criminel ne se laisse pas repérer par le relevé des seuls indices matériels, car ces derniers échouent à « dessiner le système ».

De même qu'il est vain de devoir prouver à chaque procès l'existence et les modes de fonctionnement de la mafia, de même il est vain de devoir prouver l'intention malicieuse dans la délivrance « négligente » de visas aux « hommes d'affaires » dans un pays dont plus de 60% du commerce extérieur se fait en marge de la loi, ou à des colonies de « touristes » lorsque le niveau moyen d'une province ne dépasse pas 20 EURO par mois. Il est des évidences qui, lorsqu'elles sont niées, servent de boulevard au crime organisé.

Le contexte, d'une part, mais aussi les victimes, comme on l'observe particulièrement en matière de traite des êtres humains, sont, en réalité, les principaux vecteurs d'identification des réseaux criminels.

Il est clair que lorsqu'on expulse les victimes des trafiquants d'êtres humains avant la fin de l'enquête judiciaire, lorsqu'on évite de remonter la filière des documents, on ne tient pas compte de cette caractéristique fondamentale d'un réseau criminel, à savoir qu'il se révèle d'abord par l'ombre qu'il laisse de lui-même.

Les indices matériels serviront ultérieurement à étayer les faits, et soutenir l'accusation lors du procès.

A noter qu'une telle approche n'implique pas nécessairement la nécessité de légaliser les démarches « proactives », mais implique sans doute, à tous le moins dans certains pays, des modifications de pratiques, notamment en valorisant davantage témoignages et indices contextuels au titre d'éléments de preuves invitant à enquêter de manière plus approfondie sur une « situation à risque ».

 

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