Le PKK en Europe occidentale

Depuis sa fondation, le PKK vise deux objectifs, pour lui d'égale importance : enraciner la lutte armée dans le sud-est anatolien, et s'implanter en Europe occidentale. En 1984, la reprise de la guérilla au "Kurdistan turc" s'accompagne d'une violente offensive du PKK en Europe - y compris sur le front intérieur. Le PKK entame alors une impitoyable reprise en main, intimidant ou éliminant les "collabos" de la Turquie et ses propres transfuges. De ce fait, dès 1984, 18 militants du PKK sont expulsés d'une Suède pourtant généreuse en matière d'asile politique. Entre la Suède, la Suisse, la RFA, le Danemark et la France, assassinats et incendies font une vingtaine de morts entre 1985 et 87 (1)  . Objectif de la manśuvre : contrôler dans toute l'Europe les 6 à 700 000 émigrés et réfugiés kurdes de Turquie, dont près de 500 000 en Allemagne.

Au nord de l'Europe, le PKK est présent :

. En France (où il y aurait, selon les sources, de 60 à 100 000 Kurdes ressortissants turcs). En février 1990, plus de cent cinquante militants du PKK se heurtent aux forces de l'ordre, devant le Grand Palais de Paris, alors que le président Mitterrand inaugurait l'exposition "Soliman le magnifique" en compagnie de Turgut Özal, son homologue turc. Depuis, des manifestations du PKK se produisent à peu près tous les mois à Paris. Dissoutes fin novembre 1993, les associations servant de paravent au PKK, Comité du Kurdistan et Yek-Kom, se sont reconstituées sous les noms de : Centre d’information du Kurdistan, Association culturelle des travailleurs kurdes en France et Comité national de solidarité avec le peuple kurde. Il y aurait aujourd’hui un millier d’activistes du PKK en France, et ± 5000 sympathisants actifs. En avril 1995, lors d’un procès de racketteurs du PKK, la présidente du tribunal qualifie l’activité du PKK de terroriste “car [son] action de lutte armée en Turquie s’accompagne délibérément d’actes de violence contre les personnes et les biens à l’étranger, notamment en France”.

. En Grande-Bretagne. A Londres, le PKK dispose de 7 à 800 militants et sympathisants actifs. Une note confidentielle du National Criminal Intelligence Service britannique (datée de février 1994) précise que le racket sur la communauté kurde de Grande-Bretagne a rapporté en 1993 ± 20 millions de francs au PKK.

. En Suède, où les Kurdes sont ± 10 000 (2) .

. En Belgique. Ce pays, où le PKK n’est pas dissous, est considéré par les experts comme sa plaque tournante en Europe. En février 96, des militants du PKK ont manifesté à Bruxelles, devant le parlement européen  (3).

. En Suisse, pays où le PKK expérimente depuis peu la “méthode allemande”. En novembre 1995, un commando de ± 150 de ses militants armés de triques et d’armes de poing attaque un banquet, ± 700 personnes, d’une association d’amitié helvético-turque, dans un village proche de Zürich. 7 blessés sérieux, intervention de la police, etc. En février 1996, la presse helvétique a signalé l’implantation d’un “centre d’entrainement sportif” du PKK dans la bourgade de Mont-Soleil.

. Il existe encore des communautés kurdes non négligeables aux Pays-Bas (± 40 000) et au Danemark (où l’ERNK a un bureau).

. Au sud de l'Europe, le PKK est présent en Italie,

. Hostilité à la Turquie oblige, il est persona grata en Grèce (4) et dans la partie Hellénique de Chypre.

C'est enfin en Europe occidentale qu’au début de 1995 le PKK a commencé de réunir son "parlement du Kurdistan en exil" itinérant. Fin février, la "commission préparatoire" à la première session du "parlement" s'est réunie à Bruxelles, en présence de députés du DEP. La première session elle-même s'est tenue à La Haye, Pays-Bas, au mois d'avril 95. Etaient présents les 65 "députés", "élus par des Kurdes de la diaspora", selon le porte-parole du "parlement", Yasar Kaya. Parmi les "députés" 12 membres de l'ERNK - les autres n’étant semble-t-il que des comparses du PKK.
Dans le monde occidental, mais hors d’Europe, le PKK contrôle aux Etats-Unis le bureau AKIN “American-Kurdish Information Network”.
 

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(1) Les “sentences” sont rendues par le “Tribunal populaire révolutionnaire” du PKK et exécutées par un “Groupe des opérations spéciales”. Le dernier de ces meurtres avérés remonte à 1993 en Allemagne et à 1991, en France. Le PKK pratique également la séquestration et la torture.
(2) Pourtant tolérante à l’extrème envers tout “Mouvement de Libération” du Tiers-monde, la Suède a qualifié dès 1984 le PKK de “groupe terroriste” et interdit A. Ocalan de séjour
(3) En Belgique, le PKK est allié à un petit mouvement d’extrème-gauche, le Parti du Travail de Belgique. Il est implanté dans la communauté des mineurs kurdes du Limbourg, à Verviers et Liège, ainsi qu'à Bruxelles, l’un des pôles de la ligne de chemin de fer Cologne-Bruxelles, très fréquentée par les émigrés kurdes en Europe.
(4) Athènes, juin 1990, “Hamit”, l'un des dirigeants de l’ERNK participant à la “Conférence des partis socialistes d’Europe et de la Méditerranée”, “remercie la Grèce pour son aide” et demande une rallonge à la subvention annuelle de 10 millions de dollars qu'elle accorde au PKK. A la tribune, Mihailis Kharalambidis, du comité central du Pasok.