Pétrole oblige, l’ensemble Azerbaïdjan - Géorgie est le théâtre principal du Grand Jeu de cette fin de siècle. Plus ou moins subtilement, la Russie soutient les séparatistes Abkhazes musulmans en lutte contre le gouvernement central géorgien(1)  , et les Arméniens en guerre ouverte avec l’Azerbaïdjan. Dans ce dernier pays, lors d’un putsch maquillé en crise politique, la fraction pro-Russe fait tomber durant l’été 1993 le président pro-Turc Abulfeys Elchibey(2)  . La rivalité pétrolière Russie - Turquie dans le Caucase a pris depuis lors la forme très concrète d’une lutte pour le contrôle des pipe-lines qui, demain, serviront à transporter le brut de la Caspienne vers l’Europe occidentale. Le pipe Russe est déjà en service - mais traverse la Tchetchénie. Le pipe turc doit d’abord relier les sites d’extraction d’Azerbaïdjan à Batoumi, en Géorgie, puis de là, le port de Ceyhan, sur la côte méditerranéenne de la Turquie. Mais il passera près des secteurs où le PKK est actif... le Grand Jeu régional a encore de beaux jours devant lui...

Depuis la disparition de l’URSS, la Géorgie est en proie à une anarchie rampante, traversée d’épisodes de guerre civile ou de conflits ethnico-religieux (séparatisme en Abkhazie et en Ossétie du sud(3) ). Au-delà, la Géorgie est un véritable catalogue des dangers de la Zone des Tempêtes : présence avérée des mafias turques et des gangs de l’ex-URSS, terrorisme. Sans oublier les milices politico-criminelles, sortes de grandes compagnies comme les Mkhedrioni (cavaliers), impliqués en août-septembre 1995 dans un vaste trafic d’armes automatiques et de stupéfiants, ainsi que dans l’organisation d’un attentat qui, récemment, a failli tuer le président Edouard Chevardnazde.

(1) Selon des données fiables, il y a en Abkhazie 46% de Géorgiens, 17% d’Abkhazes, 14% d’Arméniens et 14% de Roms.
(2) Une nouvelle qui a été accueillie avec soulagement à Téhéran. Jusqu’à son accession à la présidence, Elchibey prônait en effet la “libération de l’Azerbaïdjan du sud du joug iranien”...
 (3) Il y a en Ossétie du sud 62% d’Ossètes et 29% de Géorgiens