Un texte important des B.R.-PCC ("Politique et Révolution1 -
Turin, juillet 1983") résume bien l'histoire des B.R. au cours des
années critiques 1978-80. Selon les B.R.-PCC, la "campagne de printemps"
1978 devait marquer, pour l'organisation, la fin de la phase de propagande
armée. Jusqu'à la fin de cette campagne, l'objectif des B.R.
était le suivant :
" Frapper au coeur le projet de la bourgeoisie qui avec la Démocratie
Chrétienne et Moro, se proposait, par le biais du compromis historique
avec le PCI, de pacifier le prolétariat et de vider les luttes de
celui-ci de leur contenu".
Après, l'ordre du jour était de sortir de la logique
de l'organisation communiste combattante, et de faire "le saut au Parti".
Mais là, un grave problème se pose : chaque colonne s'acharne
à prendre en compte en premier lieu, pour les besoins de son enracinement,
les contradictions principales, locales, qui diffèrent d'une ville
à l'autre. Paradoxalement, plus les colonnes s'enracinent, et plus
la ligne politique générale de l'organisation se désagrège
! Au bout du compte, il finit par y avoir autant d'identités au
sein des B.R. qu'il y a de "pôles d'organisation [de colonnes de
ville].
A la fin de l'année 1980, la Colonne milanaise Walter Alasia
sort des Brigades rouges et sombre, d'après les B.R.-PCC dans l'"ouvriérisme"
et dans le "syndicalisme armé" [voir en annexe].
En octobre 1980, paraît une "résolution stratégique",
de ton très "mouvementiste" annonçant un "retour au social",
dissertant longuement sur le "prolétariat extra-légal" et
désignant le "prolétariat métropolitain" comme nouveau
sujet révolutionnaire.
Le "mouvementisme" n'est pas une nouveauté au sein des B.R..
Dès le début, une fraction non négligeable de l'organisation
considère que les jeunes marginaux des villes, les chômeurs,
les délinquants sont un sujet révolutionnaire de choix, sinon
le sujet révolutionnaire. En témoigne ce texte tiré
du N° 2 (et dernier) de "Nouvelle Résistance", daté de
février 1971. "N.R." est l'organe de la "Gauche prolétarienne"
italienne, ancêtre direct de ce qui s'est d'abord appelé "la
brigade rouge" :
"La révolution moderne n'est plus une révolution propre
(…) elle recrute ses éléments en pêchant en eau trouble.
Elle avance par des voies détournées et elle se trouve des
alliés en tous ceux qui n'ont aucun pouvoir sur leur propre vie
et le savent (…). Dans l'attente de la grande fête révolutionnaire
où tous les expropriateurs seront expropriés, le geste criminel
isolé, le vol, l'expropriation individuelle, le saccage d'un supermarché
ne sont qu'un avant-goût et un signe de l'assaut futur contre la
richesse sociale".
Cette tendance "mouvementiste" est très forte, dominante, même,
dans la Colonne Romaine. Contrairement à ses soeurs du Nord de l'Italie,
elle n'a aucune tradition ouvrière et communiste. Elle est formée
tardivement, en 1977 par la fusion de deux petits groupes venus, comme
on dit en Italie de l'"aire du terrorisme diffus" ; les "Formations armées
communistes", créées en 1974 et les "Unités Combattantes
Communistes" (1). En 1976, les UCC enlèvent
un négociant en viande et exigent, contre sa libération,
la vente de 70 tonnes de viande à bas prix dans des quartiers prolétaires
de Rome : geste "mouvementiste" s'il en fût…(le malheureux négociant
sera libéré avant que la transaction ne s'opère).
DECEMBRE
TEXTE THEORIQUE :
Publication de "L'abeille et le Communiste", "Eléments pour
la critique marxiste de l'économie politique et pour la construction
du programme de transition au Communisme" (ouf!). Les "XX thèses
finales" de "L'abeille" mettent en avant les concepts de "système
de pouvoir rouge" et d'"organismes de masse révolutionnaires" que
l'on retrouvera plus tard au centre du projet du Parti-Guérilla
du Prolétariat Métropolitain.
ACTIONS
"MILITAIRES" :
Enlèvement du juge Giovanni d'Urso, haut fonctionnaire au ministère
de la Justice (relâché le 15.01.1981) après la fermeture
de la prison de l'Asinara jugée "infernale" par les B.R.. La "campagne
d'Urso" est la dernière menée par les B.R. en tant qu'organisation
centralisée et unie.
(1) A ne pas confondre avec l'Union des Communistes
combattants, issue de la "2° position " des BR-PCC au début
de 1985.
(retour au texte)