B. Des lois internes à respecter

1) le « règlement intérieur »47

Les gangs de motards se sont dotés d'une sorte de « constitution » interne qui régit la vie à l'intérieur du groupe. Là encore, il existe plusieurs variantes de cette charte mais elle doit tout de même répondre à certains problèmes : les conditions d'adhésion et de radiation du club, la discipline, les procédures administratives régissant les activités. Ce tronc commun est le suivant :

- être âgé d'au moins 18 ans (ou 21 ans) ;

- être blanc48 ;

- utilisation d'une moto de marque Harley Davidson ;

- parrainage obligatoire par un membre attitré ;

- période probatoire obligatoire ;

- paiement obligatoire de la cotisation fixée par le Président ;

- interdiction (sous peine d'exclusion) de consommation de stupéfiants par injection (héroïne).

Il existe également d'autres règles portant sur le côté « administratif » du club (organisation des réunions, du vote, conditions de quorum et de majorité, fixation des amendes,...) ou des règles plus générales (respect de la parole donnée, entraide entre membres, pas de tromperie entre membres,...). Le « prospect », pour être accueilli en tant que tel dans le chapitre, doit avoir été parrainé par un membre à part entière. Après sa période de probation, il faut que les membres votent à l'unanimité son entrée dans le club. Dans le cas contraire, il peut être décidé (toujours après un vote) de prolonger sa période d'observation, de le chasser purement et simplement du club ou encore de le considérer comme un simple hangaround. Il existe également des règles très strictes lors des randonnées (ou « runs ») du club. D'ailleurs, un « road-captain » (meneur) est en charge des déplacements (choix de l'itinéraire, des lieux de repos, négociations avec la police au cours du trajet,...). Ces déplacements obéissent également à une organisation très stricte (permettant ainsi aux forces de police de savoir qui est qui au sein de l'organisation). Le meneur est à la gauche du Président et ils se situent tous les deux en tête de la colonne ; viennent ensuite l'ensemble des autres membres (par deux) puis les « aspirants » suivis des autres comparses (hangarounds). Le cortège est fermé par le sergent d'armes, assisté parfois d'un second meneur. A noter également qu'une camionnette (parfois accompagnée par une ou deux voitures) précède ou suit le cortège d'environ un à deux kilomètres : souvent conduite par des femmes, elle transporte le ravitaillement, les pièces détachées mais aussi parfois des armes et de la drogue. En général, ces « voitures-balais » sont équipées en matériel de télécommunication et en scanner pour écouter les fréquences de la police. Ce type "d'escorte" est cependant de moins en moins utilisé : des contrôles systématiques étant effectués par les services de police.

2) la protection de la bande

Cette protection se fait à différents niveaux : juridique, financier, militaire, renseignement.

Au niveau juridique, le sigle, les couleurs, le dessin et le mot « Hells Angels » sont maintenant mondialement protégés : toute utilisation frauduleuse (sans reversement de droit d'utilisation de cette « marque ») peut donc entraîner des poursuites civiles. Ainsi, l'éditeur de bandes dessinées (les fameux « comics »), Marvell, a du changer le nom d'une bande dessinée appelée "Hell's Angels" sur une super-héroïne bionique. En 1989, une société de Los Angeles est attaquée en justice pour avoir produit le film "Nam Angels" qui dépeignait les HA comme des mercenaires durant la Guerre du Vietnam. Au milieu des années 90, une société textile est également poursuivie sur le fondement de la propriété intellectuelle. Plusieurs sociétés importantes (notamment dans l'industrie de la mode et du jean) ont voulu utiliser le logo des HA. Sonny Barger a ainsi pu déclarer : "Je suis fier qu'on veuille nous acheter notre logo. Mais nous allons en prison pour lui. Nous mourrons pour lui. Ils n'ont aucun droit là dessus".

Les Hells Angels manient également l'art de l'attaque en diffamation (ou les menaces d'attaques) à l'encontre des journalistes. Un éditeur de dictionnaire canadien anglophone a du changer la définition du mot « Hells Angels » sous peine de poursuites. Plusieurs journalistes (au moins au Canada et en France) ont également été poursuivis ou menacés de poursuites pour des articles ou des livres concernant le gang. En mars 1998, le domicile d'un journaliste de Radio-Canada à Vancouver est saccagé. Il venait de faire une enquête sur la présence des gangs de motards dans les ports de Vancouver et d'Halifax. Une importante pression est également mise sur les policiers lors des interpellations ou même des contrôles routiers : plaintes quasi-systématiques pour harcèlement voire violences. Sur le plan financier, les H.A. ont créé deux fonds spécifiques. Le premier est le fonds TCB ("Taking Care of Business") destiné aux activités du club comme les randonnées mondiales et les différents voyages (et, sans doute, accessoirement aux activités criminelles de grande ampleur). Ce fonds est alimenté par les chapitres eux-mêmes qui doivent y verser une sorte de « redevance » mais aussi par une partie des droits dérivés et du merchandising H.A. (aujourd'hui disponibles sur Internet) : calendriers, t-shirts, casquettes,... Il existe en outre un « Fonds de Défense » de création plus récente, également alimenté par les chapitres et les ventes diverses. Son rôle est de soutenir les membres interpellés et emprisonnés, injustes victimes du harcèlement policier et judiciaire. Ce « Defence Fund » permet de soutenir financièrement les familles des prisonniers et également d'assurer leurs frais d'avocat. Dans certains cas, les chapitres mettent en place des fonds spécifiques lors de l'arrestation de tel ou tel membre important. Les HA n'hésitent pas à utiliser les services d'avocats de renom, souvent issus de l'Université de Californie du Sud. Ce fonds est estimé à plus de 20 millions de dollars et est co-administré par les chapitres d'Oakland et de Cleveland. Chez les Bandidos, il existe une structure spécifique chargée de correspondre régulièrement avec les membres incarcérés et de leur envoyer des colis.

Pour couvrir leurs activités, les HA ont également créé des Églises : la "Church of the Angels" et la "Church of the Free Highwaymen". Ayant le statut d'organisation religieuse, ces "religions" sont protégées par la Constitution et bénéficient d'avantages fiscaux. Elles sont rattachées à "l'Église de la Vie Universelle" basée à Modesto (Californie) et ordonnant des "prêtres" par courrier ou par e-mail pour 15$. Outre des opérations de blanchiment, ces églises permettent également de louer discrètement des véhicules ou des hôtels. Enfin, les "prêtres" ont un accès privilégié aux établissements pénitentiaires.

Les H.A. craignent également des attaques plus « musclées » en provenance de gangs rivaux, aussi attachent-ils une certaine importance à la sécurité de leurs locaux (symbole de leur puissance sur un territoire donné). Les repaires (autrefois « squatts » un peu anarchiques) sont devenus au fil du temps, de leur puissance et de leur enrichissement de véritables forteresses. Les sous-groupes peuvent entourer leur repaire de fil barbelé ou de hauts murs percés de meurtrières, le tout gardé par des chiens dangereux49 et des caméras de vidéo-surveillance. Les gangs plus riches, comme les Hells Angels, ont, eux, des immeubles plus cossus où la surveillance est plus discrète. Elle se fait surtout par de la vidéo-surveillance (y compris par micros sonores et détecteurs de mouvement) et un « prospect » est toujours en faction à l'entrée du local (gardé 24 heures sur 24). Il existe souvent une pièce particulière où se trouvent les différentes consoles de contrôle d'accès et, parfois, les vitres et portes sont blindées. Souvent, des armes sont à portée de main (y compris des grenades) et parfois, il existe des pièges en cas de pénétration indue dans les locaux (armes à feu, pièges incendiaires, animaux venimeux,...). Outre la fonction de défense, cette sécurisation renforcée des locaux est également destinée à ralentir les forces de police en cas de perquisitions. Certains repaires ont également une salle de musculation, un bar privé, un sauna,...

3) la collecte du renseignement

On l'a vu précédemment, beaucoup de H.A. sont d'anciens militaires. Certains ont même reçu une formation en matière de renseignement ou de contre-espionnage : une formation qu'ils se sont empressés de faire profiter leur nouvelle « famille », le gang. Ainsi, chez les H.A., il existe la fonction d'officier de renseignement en charge de ces questions au sein d'un chapitre ou d'une zone géographique déterminée. Aux Etats-Unis, ces zones sont regroupées en deux groupes (Côte Ouest et Côte Est) qui se réunissent régulièrement pour confronter leurs informations sur les groupes rivaux, les forces de police, les gardiens de prison ou tout autre « ennemi » potentiel (magistrats, journalistes, hommes politiques,...). Ainsi, sont constituées des « phototèques » avec les photos des intéressés mais aussi leur adresse personnelle, leur plaque minéralogique50, des informations sur leur famille51,... Les policiers sont systématiquement filmés ou pris en photo lors des descentes, des contrôles ou des perquisitions. Ainsi, la revue canadienne "Rider's Mag" (proche des Hells Angels) publie dans son édition papier et sur son site internet52 les photos des enquêteurs en charge de la lutte contre les gangs de motards53.

Dans cette récolte d'informations, le rôle des femmes est très important : elles se font parfois engager à des « postes stratégiques », c'est à dire des administrations intéressant les gangs de motards (police et justice bien sûr mais aussi le fisc54, les télécoms, les autorités routières et toute autre administration permettant d'obtenir divers formulaires vierges pour des activités illégales). Mais, plus largement, les Hells Angels ont développé une véritable culture du renseignement : ainsi, des femmes, proches d'eux, se sont faites engager comme employées dans des hôtels accueillant des conférences nationales ou internationales sur les gangs de motards. En février 1998, une gardienne de la prison de Rivière-des-Prairies est arrêtée pour avoir vendu à des membres des Rock Machines la liste des visiteurs d'un Hells Angels. Plus inquiétant, un document confidentiel d'Interpol s'est retrouvé, quelques semaines après sa rédaction, à la une du bulletin interne des H.A. anglais. L'enquête interne a permis de découvrir que la fuite venait d'une secrétaire au siège de l'O.I.P.C.-Interpol, à Lyon. On a également découvert que le Président du chapitre H.A. de Manhattan (New-York) avait réussi à se procurer un manuel secret du Département du Trésor sur les gangs de motards. D'autres documents sur des enquêtes en cours ou sur des gangs rivaux et provenant du F.B.I. et du "El Paso Intelligence Center" (EPIC) ont fini entre les mains des HA. Au plan local, plusieurs affaires ont montré l'infiltration des gangs de motards au sein des services de police et de justice :

- dans l'Ohio, un policier local était l'amant d'une associée des HA, à qui il achetait également de la cocaïne pour son usage personnel ;

- en Virginie : un parent d'un membre d'un HA travaillait dans un tribunal local et fournissait des renseignements sur des enquêtes en cours. Dans une autre ville, c'était un juge qui revendait des informations. Un policier, ancien membre des "Navy SEAL" (forces spéciales de la Marine), a vendu des munitions spéciales à un proche des HA ;

- au Tennessee : l'ancien Président du "Family Nomads MC", gang proche des HA, se vante d'avoir de nombreux amis dans la police locale ;

- dans l'Etat de New-York : il a été avéré qu'un ancien membre du NYPD55 avait des contacts avec les HA. Les HA ont également des liens avec le groupe de motards "Attiqua MC", composé en grande partie d'officiers de police du Comté de Westchester ;

- en Nouvelle-Angleterre : En 1994, le sergent d'une police locale a été identifié comme étant membre du gang des "Grim Reapers". Un employé communal a été arrêté dans une affaire de racket d'une société avec un membre des HA et un mafieux italo-américain. Enfin, Mike Hitchcock, membre du chapitre HA de Pittsfield, travaillait dans une société informatique ayant des contrats avec des services de police locaux et d'État ;

- en Californie : les cas de liens entre policiers et membres ou proches de gangs sont assez nombreux. Plus récemment, c'est un procureur du Comté d'Orange (Californie), Bryan Kazarian, qui est arrêté dans le cadre du démantèlement en juin 1999 d'un réseau de trafic de drogue (le fondateur et Président du chapitre local des HA a également été arrêté) ;

- au Nebraska : un officier de police achetait sa marijuana auprès d'associés des HA. Même chose pour un employé du Gouverneur d'État qui se procurait sa cocaïne et ses méthamphétamines auprès des HA ;

- à Montréal (Canada) : en avril 2001, un policier et deux détectives privées (dont un ancien policier) sont arrêtés pour avoir fourni des informations confidentielles à des criminels russes et à des membres de gang de motards.

4) la "structure média"

De part leur histoire, les H.A. ont compris très tôt l'importance des médias dans le développement de leurs activités. Ils sont « nés » grâce aux médias : l'affaire d'Hollister, le concert d'Altamont, le viol de Monterrey,...56 les ont fait connaître nationalement et les films d'Hollywood ont propagé leurs mythes. On peut notamment citer57 :

- 1954 : « The Wild One » de Stanley Kramer avec Marlon Brando et Lee Marvin. Basé sur un article concernant les incidents d'Hollister, le film fait des Hells Angels un symbole de rébellion. L'arrivée d'une bande de jeunes motards provoque, dans une petite ville tranquille de l'Amérique profonde, des réactions diverses dans la population. Le tee-shirt porté dans ce film par Lee Marvin sera même racheté par le Président du Chapitre Hells Angels de San Francisco.

- 1967 : « Hells Angels on Wheels » avec Jack Nicholson. Ce film aura un impact limité malgré la présence de Sonny Barger (considéré comme le Président international des Hells) et du chapitre de San Francisco. Le film est une succession de fêtes, de bagarres, ... sans doute la meilleure illustration de la vie quotidienne dans ce genre de groupe. La même année, Hunter S. Thompson publie « Hells Angels, the Strange and Terrible Saga of the Outlaw Motorcycle Gangs » 58, qui deviendra un véritable best-seller.

- 1969 : « Easy Rider » de Peter Fonda avec Peter Fonda et Denis Hopper. Sans doute LE film culte de ces années agitées. Il s'agit d'une sorte de « road-movie » : deux amis parcourant les États-Unis sur leur moto et rencontrant des personnes fascinées ou effrayées par leur mode de vie. Le film commence par une scène de vente de stupéfiants.

Très vite, les gangs bikers sont devenus des « communiquants », allant bien au delà des menaces juridiques ou physiques qu'ils adressent aux journalistes trop critiques. Leur souci principal reste de passer aux yeux de l'opinion publique comme des marginaux au grand coeur. Dans ce but, les Hells Angels s'impliquent volontiers dans des opérations caritatives, notamment en faveur des enfants (sans doute ce thème est plus « porteur » au niveau image...) : ils sont ainsi les principaux organisateurs de l'opération « Des jouets pour des enfants » ; ils participent également à la collecte de sang destinée aux hôpitaux pour enfants ; les H.A. français ont également participé au Téléthon en acceptant de conduire des jeunes myopathes sur leurs motos de rêve. Mais ils organisent aussi d'autres évènements : des fêtes pour la Saint-Valentin ou pour la Saint-Patrick. Autre exemple : chaque année depuis le début des années 90, des centaines de dindes sont distribuées à Noël aux familles pauvres du Nevada par le "Sally Burgess Conforte Memorial Turkey Giveaway". Sally Burgess Conforte59 étant décédée en 1992, c'est son neveu qui s'occupe actuellement de la distribution : David Burgess est le Président du Chapitre Hells Angels de Reno. Les H.A. sont également très présents dans la presse spécialisée : soit parce que ce sont des annonceurs importants (fêtes organisées, sociétés contrôlées,...), soit parce qu'ils contrôlent plus ou moins directement l'organe de presse. Ponctuellement, il leur arrive également de faire des « coups » médiatiques. Ainsi, en 1984, lors des Jeux Olympiques de Los Angeles, un haut responsable mondial des Hells, Georges Christie, participe au relais de la flamme olympique. Cette image d'un motard portant la flamme sur un kilomètre, encouragé sur son parcours par les membres de sa « confrérie » portant leurs couleurs, est diffusée en direct sur nombre de télévisions américaines et étrangères. Le long du parcours, une collecte est organisée en faveur d'un hôpital pour enfants. Seule une somme symbolique sera reversée à l'institution, qui avait alertée les médias. Un nouveau « coup médiatique » se prépare puisque le réalisateur Ridley Scott et le scénariste Anthony Zucker ont signé pour faire un film en 2002 sur les H.A., basé sur l'autobiographie de Sonny Barger60.

Aujourd'hui, les motards ont investi Internet. Les trois principales organisations internationales (Hells Angels, Bandidos et Outlaws) possèdent leurs propres sites, ainsi que beaucoup d'autres organisations plus petites. La palme revient sans nulle doute aux Hells Angels dont une trentaine de chapitres ont leur site propre, indépendant du site principal de l'organisation.61 Le point commun de ces sites reste les produits dérivés mis en vente « on line » : calendriers, t-shirts, autocollants,... L'argent ainsi récolté est en partie reversé au « Fonds de Défense » pour aider les membres incarcérés. Il y est fait état des divers évènements organisés par le club : les randonnées, les fêtes pour les anniversaires des clubs, les manifestations caritatives,... Certains chapitres développent l'histoire de l'organisation ou du chapitre même ; beaucoup donnent leur e-mail (collectif voire ceux des membres importants du chapitres). Il y a beaucoup de photos : des membres dirigeants, du local, des randonnées,... Il faut dire que les sites dans leur ensemble sont très animés et vivants. Il y a parfois une revue de presse : il s'agit de montrer par l'accumulation les « preuves » d'un complot policier pour détruire l'organisation. Un site propose une page « Ce que les américains doivent savoir sur la loi R.I.C.O.62 » ; un autre met en vente des t-shirts « Stop Cop Crime » ou « Bikers against Police Harassment ».

Plus largement, les bikers se retrouvent dans les associations des droits civils des motards, au point d'un avoir complètement infiltré une : la « Confederation Of Clubs ». La C.O.C. regroupait fin avril 1999 plus de 300 clubs ou chapitres dans 32 États américains et deux provinces canadiennes63. Début mai 1999, une réunion de cette association se tenait à Daytona Beach et rassemblait des clubs de motards criminels (Outlaws, Bandidos, Pagans, Warlocks64, Sons of Silence,...) mais aussi d'autres groupes (Christian Motorcycle Association, Harley Owners Group, Tribe of Judah,...). Cette association se pose comme un lobby motard qui, dans la lignée de la « National Coalition of Motorcyclists » (NCOM), se bat contre le port du casque obligatoire, contre le harcèlement policier,... Ces deux associations sont soutenues dans leur combat par l'AIM (Aid for Injured Motorcyclists), un groupe d'avocats américains spécialisés dans la défense des motards. Ce dispositif semble vouloir être récupéré par le clan anti-Hells comme le montrent la liste des participants (Outlaws et Bandidos en tête) et le lieu de la réunion (Daytona Beach, « sanctuaire » des Outlaws »). Mais, plus largement, ces organisations sont utilisées par l'ensemble des groupes criminels pour diffuser une image positive et unie face à l'opinion publique. Ce lobby motard est particulièrement actif dans la lutte contre la "discrimination" dont ils font l'objet et le C.O.C. se fait souvent le porte-parole du mouvement. Quelques exemples de leurs actions : poursuites contre les forces de l'ordre pour harcèlement (le Shérif de Santa Barbara contre les "Bravados MC" ; plusieurs services de police de l'Oklahoma contre les "VietNam Vets" ; le shérif du Comté de Clark contre les "Free Souls" ; ...) ; contre des bars refusant l'entrée de motards porteurs de "couleurs" (cas des "Loners MC", des "Vagos", des "Hessians", des "POBOB's", des "Scream City" ...) ; contre des villes refusant l'entrée des motards lors de manifestations spécifiques (cas de la ville de Chandler en Arizona). En janvier 2001, une lettre de protestation est adressée par la « Ontario Confederation of Clubs » à la firme de jouets Playmobil. L'association reproche à cette société d'avoir commercialisé des figurines représentant trois policiers contrôlant un biker. La filiale canadienne de Playmobil a présenté ses excuses et assuré que les figurines ne seront plus fabriquées.

Dans le même souci de publicité positive, on retrouve des Hells Angels très proches du milieu du show-biz65, sans doute à cause de l'implantation des Hells près d'Hollywood. On peut ainsi citer un fait-divers somme toute banal, une bagarre dans une boîte de nuit en 1998. Sont impliqués l'acteur américano-belge Jean-Claude Van Damme, son ancien garde du corps (un membre important du chapitre de Manhattan, Chuck Zito) et Mickey Rourke (connu pour son amitié avec John Gotti, longtemps parrain de la Famille mafieuse italo-américaine de New York, les Gambino). La boîte en question, le « Scores », est connue pour être le lieu de rendez-vous des grands noms du show-biz et du sport mais aussi pour être détenue, en sous main, par la Famille Gambino. « Chuck » Zito, qui a ses habitudes sur Los Angeles, est l'ancien garde du corps de Sylvester Stallone et d'autres stars hollywoodiennes (Liza Minelli, Hulk Hogan, Pamela Anderson, Michael Jackson...)66. Zito, qui a le logo "Hells Angels" tatoué sur la poitrine, est également acteur : il incarne le garde du corps d'un mafieux incarcéré dans la série "Oz"67. Un univers carcéral qu'il connaît bien puisqu'il a été condamné à 10 ans de prison pour trafic de drogue et libéré en 1990. En août 2000, la presse canadienne provoque un scandale en révélant la présence au mariage d'un membre des Hells Angels de deux stars locales : les chanteurs Jean-Pierre Férand et Ginette Réno68. Ceux-ci ont chanté à ce mariage de 350 personnes sur la demande du comédien Claude Blanchard, vieil ami (et associé dans une boîte de nuit) du mafieux montréalais Vic Cotroni69. En Californie, certains travaillent même directement pour l'industrie cinématographique : sécurité, cascadeurs, figurants,... Plusieurs Hells Angels californiens ont ainsi joué des rôles mineurs dans le film "Gladiator"70.

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47 « les gangs de motards » OIPC, op. cit.

48 Sur la question du racisme, se reporter plus haut.

49 Voire d'un lion comme chez les "Loners", au Canada

50 En décembre 2000, 3 québécois, ayant accès à une base de données sur les assurances automobiles, sont inculpés pour avoir fourni des informations aux Rock Machines.

51 Lors de perquisitions dans les locaux des Hells Angels en décembre 2000 à Oslo et à Trondheim puis en janvier 2001 à Stavanger , la police norvégienne découvre des listes où figurent les coordonnées de plusieurs centaines de policiers et de leur famille.

52 www.theridersmag.com

53 Voir "Bikers in Web War against police" - Toronto Star - 31/03/2001

54 En décembre 2000, une employée du Ministère du Revenu à Québec est suspendue pour avoir fourni des informations sur 4 policiers à un membre du Chapitre des Hells Angels de Québec.

55 New York Police Department

56 Voir p. 43 et suivantes.

57 Lavigne, op. cit.

58 Publié en France en 1979 par les Humanoïdes Associés, le quatrième de couverture sera estampillé du sigle « Hells Angels - Paris » (alors que le club n'avait pas encore été intronisé) dont le dessin (la tête de mort ailée) laisse apparaître une discrète croix gammée.

59 Elle est la veuve de Joe Conforte, lui aussi décédé, ancien propriétaire du "Mustang Ranch", maison close de la région de Reno.

60 Voir la rubrique "Black'n Way" - magaine Freeway - n°112 - avril 2001

61 Pour les adresses de ces sites internet, voir la liste en annexe.

62 Racketeering Influenced ans Corrupt Organizations Act est un instrument juridique important dans la lutte contre le crime organisé aux U.S.A.. Cette loi des années 60 permet de poursuivre un groupe criminel en tant que tel pour les crimes et délits commis mais également pour la finalité même de ce groupe, c'est à dire le crime organisé. Les activités de « racket » (nécessaires pour la mise en application de cette loi) comprennent les infractions suivantes : menaces de mort, kidnapping, jeux clandestins, incendie volontaire, vol, cambriolage, extorsion, corruption, contrefaçon, chantage, obstruction à la justice, racket (au sens strict), prostitution, fabrication et trafic de drogue.

63 Un des fondateurs du "C.O.C." de l'Ontario, Bernie Guindon, a fondé en 1961 le club des "Satan's Choice", qui est devenu en décembre 2000 un chapitre Hells Angels.

64 Alors même que le président d'un chapitre Warlocks était abattu en février 1991 par deux Outlaws.

65 Les stars aiment également se frotter aux « méchants garçons » de la pègre. Les exemples sont connus : Franck Sinatra, Alain Delon, Marilyn Monroe, Robert DeNiro, Julio Iglesias, Mickey Rourke,...

66 Voir les photos sur son site personnel : www.chuckzito.com

67 Cette série réaliste américaine se déroule dans un pénitencier moderne où cohabitent divers groupes (mafieux italo-américains, "Fraternité aryenne", gangsters noirs, "blacks muslims",...).

68 Une photo montre même Ginette Réno chanter en compagnie de Maurice "Mom" Boucher, un des principaux leaders canadiens du gang.

69 Vincenzo Cotroni (né en Calabre en 1911 et mort en 1984) début sa carrière criminelle dans le trafic d'alcool à Toronto dans les années 20-30. Associé à la Famille Bonnano de New York et aux milieux corse et marseillais, Vic Cotroni est impliqué dans les années 60 et 70 dans les réseaux de la French Connection. Ses frères Frank (né en 1931) et Giuseppe (1920-1979) sont également des figures importantes de la Mafia de Montréal.

70 Film sorti en 2000 et récompensé aux "Golden Globe" et aux Oscar. Il a été réalisé par Ridley Scott, également pressenti pour le film sur l'histoire des Hells Angels.