SERBIE (1)

La Serbie actuelle, qui inclut la Vojvodine et le Kossovo, a une superficie de - 88 700 km2 (dont 56 000 km2 pour la “petite Serbie”). Sa population est de - 9,7 millions d’habitants, serbes à - 67%.

La situation actuelle de la Serbie -et ses développements futurs- sont incompréhensibles sans un bref rappel historique. Peuple belliqueux et fier, particulièrement redoutable dans les guerres de Partisans, les Serbes ont été soumis par les Ottomans après des décennies d’une résistance acharnée, brisée par la défaite de Kossovo Polje, le 28 juin 1389(2)  . Ce jour-là, la fine fleur de la jeunesse serbe, conduite par le prince Lazar Hrebeljanovitch a été défaite par l’armée du sultan turc Mourad 1er à l'issue d'une bataille indécise. Le souvenir de cette catastrophe de la Saint-Vitus (Vidovdan), est au coeur du sentiment patriotique serbe; il lui a fourni, outre le jour de sa fête nationale, les thèmes fondateurs de sa poésie, épique ou populaire et ses cycles légendaires.

Cette défaite s’est produite au Kossovo, que les serbes considèrent comme le “berceau de leur civilisation”; au XIVème siècle, durant le règne du Tsar Dusan, le patriarcat serbe-orthodoxe fut établi à Pec, dans cette province. Il y restera jusqu’en 1766. Aujourd’hui encore, les Serbes considèrent Pec comme le siège spirituel de leur église.

Dès 1804, les Serbes se révoltent contre le joug ottoman - alors puissance considérable - et se libèrent en 1878(3)  . Peu après, ils affrontent sans hésiter l’empire Austro-hongrois, autre colosse européen. Le prince héritier François-Ferdinand choisit-il le 28 juin 1914(4)  , date de la saint-Vitus, pour visiter Sarajevo, alors possession austro-hongroise ? Le jeune nationaliste pan-serbe Gavrilo Princip venge cette intolérable provocation et déclenche par ricochet la première guerre mondiale.

En avril 1941 enfin, au lendemain même de l’invasion nazie, les Serbes entament une guerre de résistance achar-née, considérée par l’occupant comme la plus meurtrière du théâtre d’opérations européen, URSS comprise. Différence considérable avec des pays comme la Pologne, la Tchécoslovaquie ou la Hongrie : le communisme n’arrive pas à Belgrade dans les fourgons d’une armée d’occupation, mais y est instauré par des Partisans ayant eux-mêmes libéré leur pays. Mais, indigène et titiste, le communisme interdit, tout aussi bien que sa variants soviétique, les évolutions intellectuelles et au moment du dégel de 1991, l’inconscient collectif yougoslave en est encore en 1941 : la seconde guerre mondiale n’y a pas été “digérée” le moins du monde.

Aujourd’hui, le parti communiste serbe est devenu “socialiste”; passant d’un indigeste mélange de marxisme, de nassérisme et d’autogestion au nationalisme pan-serbe. Son chef, Slobodan Milosevitch, joue largement sur le registre des haines nationales et des rancunes historiques : chaque fois qu’il le peut, il s’affiche avec la hiérarchie religieuse orthodoxe et commémore les hauts faits des héros de l’histoire serbe(5)   L’opposition pro-capitaliste, le Mouve-ment serbe du renouveau de Vuk Drachkovitch est aussi nationaliste que le PS. Plus extrémiste encore est le Parti radical serbe de Vojslav Seselj qui, lui, ne prend même pas la peine de cacher son projet de création d’une “Grande Serbie”.

                                        LES COMMUNAUTES SERBES
                                                    HORS DE LA RFY

Sur le territoire de l’ex-RSFY, mais hors de l’ensemble Serbie-Monténégro-Kossovo-Vojvodine, les Serbes sont - 2,1 millions, dont - 600 000 en Croatie et 1,4 million en Bosnie Herzégovine. Il y aurait par ailleurs - 600 000 Serbes émigrés dans le reste du monde : CEE, continent Américain, etc.

En Croatie comme en Bosnie-Herzégovine, l’effort armé des Serbes pour créer de petites républiques indépendantes mono-ethniques, supposées rejoindre un jour la RFY, repose sur un appareil militaire alliant des “milices patriotiques” généralement baptisées “Défense territoriale” à des unités de l’ex-JNA formées de Serbes indigènes; le tout étant mis à la disposition des autorités serbes locales auto-proclamées; le plus gros de la logistique de l’ensemble est assuré, pas toujours discrètement, par l’armée fédérale de la RFY. En Bosnie-Herzégovine par exemple, le commandement de l’armée serbe est assuré par le général Ratko Mladitch, considéré comme l’un des plus brillants de l’ex-JNA et aussi comme un ultra-nationaliste serbe; il commandait auparavant en Krajina(6) .

  En Croatie, cet appareil guerrier occupe une bonne partie de la Slavonie occidentale et tout un couloir de terre le long de la Vojvodine, qui comprend la ville de Vukovar (tombée aux mains des Serbes le 19 novembre 1991) et se prolonge en Bosnie-Herzégovine. Les Serbes de Slavonie occidentale ont proclamé leur autonomie dès le 16 août 1991. A l’ouest, les Serbes (80% de la population locale) occupent toute la Krajina de Knin, qui s’est déclarée “République de Krajina Serbe” le 19 décembre 1991. Cette entité sécessionniste, présidée par Goran Hadzitch, coupe virtuellement la Croatie en deux au dessus de Split. Dans ces régions, les unités locales de l’armée “fédérale” sont bien entendu composées d’appelés et de cadres serbes indigènes.

  En Bosnie-Herzégovine, une “République serbe” s’est unilatéralement proclamée le 7 avril 1992 et a fait sécession le jour même. Son drapeau est identique à celui de la RFY. Cette “République”, capitale Banja Luka, se composait à l'origine d’un chapelet de 34 cités majoritairement serbes, dotées désormais d'une continuité territoriale par les conquêtes militaires de ces derniers mois :

. Région autonome serbe de Bosnie du nord-est : capitale Bijeljina (57% de Serbes); villes de Ugljevik et de Lopare.

. Région autonome serbe de Romanija : capitale, Sarajevo-Pale (68% de Serbes) ; villes de Sokolac et de Han Pijesak.

. Région autonome serbe de Herzégovine-orientale et de Vieille-Herzégovine : capitale, Trebinje (59,7% de Serbes); villes de Bileca, Nevesinje, Gacko, Ljubinje, Kalinovic, Rudo et Cajnice.

. Région autonome serbe de la Krajina bosniaque : capitale, Banja Luka (50,9% de Serbes, la seconde ville de Bosnie-Herzégovine); villes de Bosanska Novi, Bosanska Dubica, Bosanska Gradiska, Srbac, Prnjavor, Celinac, Tes-lic, Laktasi, Skender Vakuf, Mrkonjic Grad, Kljuc, Sivopo, Kupres, Glamoc, Bosansko Grahovo, Drvar, Bosanski Petrovac. Un couloir défendu militairement réunit désormais (août 1992) les deux Krajina, la croate et la bosniaque.

 Selon son président Radovan Karadzitch, la “République serbe de Bosnie-Herzégovine” possède fin août 1992 “un gouvernement, des institutions et un territoire”; ses objectifs militaires étant atteints, elle est prête à négocier, de ci - de là, quelques retouches à ses nouvelles frontières(7)  . Cette “République” -plutôt un patchwork d'enclaves et de mini-Etats contrôlés par diverses milices aux ordres de quelques seigneurs de la guerre- représente en fait la Bosnie-Herzégovine utile : les grandes vallées, le potentiel industriel civil et militaire, les principaux axes de communication; elle a conclu début août 92 une “alliance” avec la RFY. Commentaire attendri du ministre yougoslave des Affaires Etrangères, Vladislav Jovanovitch : “ce sont vraiment de bons patriotes serbes”... De son côté, Slobodan Milosevitch avait, le 22 juillet, réitéré son soutien à “la juste lutte des Serbes de Croatie et de Bosnie-Herzégovine”.

                                                                LES MINORITES
                                                            ET LES ALLOGENES
                                                                        EN RFY

Les principales de ces minorités sont les Albanais, les Hongrois, et les Musulmans; elles se concentrent surtout sur les marges de la Serbie proprement dite : au nord, dans la Vojvodine; au sud-ouest, au Sandjak; au sud, au Kossovo.

La Vojvodine

D’une superficie de 21 500 km2, cette province autonome frontalière de la Hongrie et de la Roumanie a pour capitale Novi sad. Elle compte - 2 millions d’habitants : - 55% de Serbes, - 19% de Hongrois (regroupés en majorité dans la région de Subotica, proche de la frontière hongroise, où ils sont présents depuis quatre siècles); - 5% de Croates, plus de petites communautés de Roumains, de Slovaques, de Ruthènes, etc.. Jusqu’à l’été de 1992, la Vojvodine était restée en marge des combats qui ont secoué l’ex-RSFY et la compétition entre communautés, regroupées derrière des partis ethniques tels que l’Alliance démocratique des Magyars (VMDK) ou l’Alliance démocratique Croate (DSHV) était pacifique. Mais depuis le mois d’août 1992, les Tchetniks de Vojslav Seselj ont commencé à “nettoyer” les villes et villages croates du nord-ouest de la Vojvodine. Les méthodes utilisées sont classiques : intimidation, menaces, ensuite, exécutions sommaires, enfin. De ce fait, 17 000 des 100 000 Croates de la région se sont déjà enfuis. Ils sont remplacés par des Serbes ayant fui la Croatie et la Bosnie-Herzégovine.

Le Sandjak(8)   de Novi Pazar

Situé à cheval sur la frontière serbo-monténégrine, ce territoire de - 9 000 km2, très montagneux, touche au nord-ouest la Herzégovine orientale et au sud-est, le Kossovo ; sa capitale est Novi Pazar, 50 000 habitants (à 80% Musul-man). Il est resté possession ottomane jusqu'en 1912, même s'il a été occupé par l'armée austro-hongroise de 1875 à 1908. Comme en Bosnie, sa population est en grande majorité formée de Slaves islamisés sous le califat Ottoman (- 200 000 Musulmans au début de 1992, avant le début des troubles actuels. Près de 70 000 Musulmans auraient fui le Sandjak depuis le début de l’été 1992). Contrairement à l’Islam bosniaque considéré comme urbain et soft, l’Islam des Musulmans du Sandjak, des paysans montagnards, est dur, radical même. A Sarajevo, le quartier de Povalici est peuplé en majorité de Sandjakis, une communauté qui a fourni à l’embryon d’armée bosniaque, trois brigades de 800 hommes chacune.

Présidé par Suleiman Ugljanin, le Conseil national musulman du Sandjak, proche du Parti d'action démocratique du Sandjak (prolongement du PAD de Bosnie-Herzégovine) -tous considérés comme “illégaux” par Belgrade- a organisé en octobre 1991 un référendum clandestin. A cette occasion, 98,92% des votants ont choisi l’indépendance. Depuis, un “gouvernement fantôme” ayant comme “premier ministre” officieux un médecin de 28 ans, Rasim Lja´c, organise sur place la résistance passive et tente de faire connaître à l’étranger le sort du Sandjak. Il a notamment décidé le retrait des députés Musulmans des parlements de Belgrade et de Podgorica et lancé un appel aux jeunes Musulmans pour qu'ils se soustraient à leurs obligations militaires dans l'armée de la RFY “tant que durera la guerre contre les Musulmans de Bosnie” et que le statut du Sandjak au sein de la RFY n'aura pas été défini. Durant l’été de 1992, le gouvernement serbe a porté à 10 000 hommes d’active l’effectif de ses troupes basées sur ce territoire, où l’on trouvait déjà 29 000 réservistes serbes remobilisés et 3 000 hommes d’une milice proche du Parti Radical serbe, sous les ordres d’un “seigneur de la guerre” nommé “Cheko” - pour la petite histoire, ex-cuisinier de l’hopital de Belgrade.

Le Kossovo

L’ex-province autonome du Kossovo a une superficie de 10 900 km2; sa capitale est Pristina. Les voisins du Kossovo sont le Monténégro, la “petite Serbie” la Macédoine-Skopje et l’Albanie. Sa population dépasse les 2 millions d’habitants, d’ethnie albanaise à près de 90%. S’y ajoute une minorité serbe en constante diminution depuis 30 ans : 24% en 1960; 13,5% en 1980 ; - 10% aujourd’hui; son dirigeant, considéré comme un “modéré”, est Momjilo Trachkovitch. On trouve enfin dans la province de petites communautés de Monténégrins et de Croates. Les Albanais du Kossovo sont pour la plupart musulmans sunnites; mais - 50 000 d’entre eux sont catholiques.

La démographie des Albanais du Kossovo est la plus forte d’Europe : une famille moyenne a de six à huit enfants; contre deux en moyenne pour les Serbes. Cette situation est ressentie comme insupportable à Belgrade où de hautes personnalités ont publiquement décrété “illogique” le taux de natalité des Albanais et “irrationnel” le nombre de ceux-ci au Kossovo; sans qu’elles aient suggéré la moindre méthode pour rétablir dans cette province la “logique” et la “raison”.

Historiquement, le nom du Kossovo, au XVIIIème siècle encore, était “la Vieille Serbie” mais dès la fin du XVIIème, à la suite d'une longue guerre entre la Sainte-Alliance et l'Empire Ottoman, des milliers de familles serbes du Kossovo, guidées par le patriarche Arsène III Tchernoevitch, s'étaient résignées à émigrer vers la Vojvodine, sous contrôle chrétien. A leur place, une migration massive d'Albanais s'opère. En 1913, le Kossovo, musulman et albanais à plus de 60% est rattaché à la Serbie; une résistance farouche s'instaure, qui dure jusqu'en 1923. Durant cette décennie, la Serbie implante ses colons sur le territoire, tandis que les élites kossovars émigrent en Turquie. Il y avait en 1921 63% d'Albanais au Kossovo ; 57% en 1939. Mais entre 1940 et 1945, Mussolini suscite et contrôle une “grande Albanie” qui s'étend au Kossovo et aux zones albanaises de Macédoine. En 1946, le Kossovo redevient partie intégrante de la République de Serbie.

Une agitation de type nationaliste reprend au Kossovo depuis 1968; mais elle adopte, au cours des années, des formes différentes :

  Révolutionnaire entre 1968 et 1978. En 1968, suite à des émeutes étudiantes, Tito crée à Pristina la première université autonome en langue albanaise de Yougoslavie; celle-ci noue immédiatement des liens avec l’Université de Tirana et toutes deux établissent alors une commune langue albanaise standardisée. Les jeunes kossovars subissent également l’influence du marxisme-léninisme stalino-mao´ste alors prôné par Tirana. L’Université de Pristina, qui met 10 000 diplômés par an sur le marché du travail, devient rapidement l’antichambre du chômage. Tant qu’il le peut, le pouvoir titiste case ces diplômés dans l’administration et le secteur culturel mais, la crise économique venue et l’administration, pléthorique, dépassant le quart de la force de travail yougoslave, la machine tombe en panne. Les jeunes chômeurs diplômés se comptent par dizaines de milliers et de nouveaux troubles éclatent en 1974 et 1978. L’agitation est le fait de groupes maoïstes comme le “Groupe marxiste-léniniste du Kossovo”, “Front rouge” ou le “Mouvement de libération nationale du Kossovo”(qui se fondent ultérieurement en un “Mouvement pour une république d’Albanie en Yougoslavie”, MRAY) et le “PC-ML de Yougoslavie”.

  Nationaliste à partir de 1981. Fin mars-début avril de cette année-là, de nouveaux troubles, très graves, éclatent à Pristina, s’étendent à l’ensemble du Kossovo et même à la partie albanaise de la Macédoine-Skopje voisine. Les étudiants kossovars mettent d’abord en avant leurs thèmes d'agitation habituels : chômage, conditions de vie et de travail, rétablissement du vrai communisme. Mais, en s’aggravant, l’émeute prend un tour nationaliste : appel à la constitution d’une grande Albanie, actes hostiles visant la minorité serbe, etc. L’Université est fermée, le couvre-feu instauré; officiellement, les émeutes font 11 tués et 57 blessés, mais les observateurs locaux parlent de plus de 200 morts.

En mars 1989, le parlement serbe de Belgrade annule l'autonomie du Kossovo et prend le contrôle direct de la police, de la justice et des forces territoriales de la province.

En juin 1989, Slobodan Milosevitch réunit un million de Serbes - la plus grande foule jamais rassemblée en Yougoslavie- pour la commémoration du 600ème anniversaire de la Bataille de Kossovo Polje, au “Champ des merles”, non loin de Pristina. Preuve que, pour les Serbes, la question du Kossovo constitue une “Alsace-Lorraine” qui n’a rien perdu de sa charge émotionnelle.
Et sur cette affaire, l’opposition anti-communiste serbe est encore plus nationaliste que Milosevitch.
Le 2 juillet 1990, les autorités de Belgrade dissolvent ensemble le parlement et le gouvernement de Pristina, qui s’apprêtaient à proclamer l’indépendance du Kossovo. Les journaux et radios en langue albanaise sont fermés; 6 000 universitaires et instituteurs albanais sont renvoyés ainsi que 2 000 policiers; sur 182 000 salariés du secteur public, 52 000 Albanais sont mis à pied sans indemnités. Riposte : dès septembre 1990, une “Assemblée de la République du Kossovo en exil” siège à Zagreb.

En avril 1991, l’état d’urgence est levé au Kossovo et de nombreux prisonniers politiques sont libérés, parmi ceux-ci, Adem Demaqi, figure du nationalisme kossovar, futur prix Sakharov 1991, qui a passé 28 ans en prison ! Réunis secrètement à Kacanak, dans le sud de la province, le 13 septembre 1991, 114 députés albanais du parlement local (sur 182 au total, avec les élus des minorités, Serbes, etc.) votent la création d’une “7ème République de la Yougo-slavie” et adoptent une constitution. Entre le 26 et le 30 septembre, les autorités clandestines du Kossovo organisent un référendum considéré comme “illégal” par les Serbes : plus de 90% des votants se prononcent pour l’indépendance. Le 19 octobre, le parlement clandestin déclare le Kossovo “Etat souverain et indépendant”; il est reconnu par l'Albanie - et elle seule jusqu'à présent - le 22 octobre suivant.

En mars 1992, le président albanais d’alors, Ramiz Alia, en campagne électorale, se déclare favorable à l’auto-détermination des Albanais - du Kossovo et de Macédoine-Skopje - et à leur union avec Tirana. Début mai, les milices serbes commencent à se déployer au Kossovo, avec les troupes “fédérales” retirées de Macédoine-Skopje et la répression s'aggrave : de 30 à 60 personnes arrêtées chaque jour et maintenues arbitrairement en prison, des semaines, des mois parfois. Malgré cela, le 24 mai, des élections législatives clandestines pluralistes sont organisées au Kossovo : il y a eu une -discrète- campagne électorale; listes électorales et bulletins de vote étaient imprimés. 6 partis (Alliance démocratique du Kossovo, de loin le plus important, présidé par Ibrahim Rugova; Parti social-démocrate; Parti démocrate-paysan, Parti démocrate-chrétien, etc.) se disputent 100 sièges et les suffrages des 900 000 électeurs inscrits. C’est l’Alliance d’Ibrahim Rugova qui remporte la majorité (75% des inscrits ayant pris part au vote); le lendemain, ce dernier est élu “président du Kossovo”. Avec le “premier ministre du Kossovo”, Buyar Bukosi, ils mènent une “guerre sans armes” : écoles, lycées, centres de soins albanais “parallèles” fonctionnent discrètement, mais, semble-t-il, efficacement; sans doute avec l’aide de l’Albanie voisine dont le nouveau président, Sali Berisha, a des ancêtres kossovars. Au-delà, la nouvelle direction clandestine du Kossovo a refusé de reconnaître la “République fédérale de Yougoslavie” et déclaré que le Kossovo et la province occidentale de Macédoine-Skopje, autour de la ville de Tetovo, ne formaient qu’une seule communauté. Le 23 juin, la police serbe interdit la réunion du “parlement clandestin” à la madrassa (école coranique) de Pristina.
 

(1) Voir p..93, “Histoire et actualité du terrorisme serbe”.
(2) La première grande bataille serbo-ottomane est celle de Maritza en 1371; le dernier royaume serbe disparaît en 1459
(3) La révolte de 1804 est conduite par Karageorge (Georges le noir), fondateur de la dynastie Karageorgevitch; celle de 1815, par Milos Obrenovitch, fondateur de la dynastie du même nom.
(4) C'est encore un 28 juin, en 1919, qu'est signé le Traité de Versailles qui crée la Yougoslavie.
(5) De son côté l’église orthodoxe serbe n’est pas moins nationaliste. Début septembre 1992 encore, la “Sainte Assemblée” de ses évêques proclame que “notre église est en faveur de l’unité du peuple serbe et des territoires serbes”.
(6) L'armée serbe de Bosnie-Herzégovine (ASBH) a hérité des arsenaux et stocks énormes constitués sur place par la JNA : le corps de bataille de l'ASBH comprend désormais ¦.80.000 hommes, ¦.300 chars, ¦.200 transports de troupes blindés, 24 avions de combat (opérationnels), plusieurs hélicoptères, des missiles sol-sol, 6 à 800 pièces d’artillerie lourde et moyenne, des “orgues de Staline”, des mortiers, des munitions et des pièces de rechange en quantité.
(7) Les objectifs militaires des forces serbes de Bosnie Herzégovine étaient à l’origine (printemps de 1992) les suivants.:
.Création d’un corridor en Bosnie du Nord permettant la libre circulation entre la Serbie et les Krajinas.;
.Contrôle de la valée de la Drina.;
.Création d’un corridor oriental, le long de la frontière de Bosnie-Monténégro, permettant aux forces serbes d’accéder à leur seule base navale de l’Adriatique (dans la région de Dubrovnik).;
.Destruction de Sarajevo, symbole d’une Bosnie-Herzégovine multiculturelle et multiconfessionnelle.
(8) Dans la langue administrative ottomane, un “Sançak” était une préfecture provinciale.
 

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