“LE PIEGE; de la malédiction libanaise à la guerre du Golfe”
Karim Pakradouni
Grasset-FMA, 316 pages, 115f. , mai 1991

Livre frustrant, mais révélateur, que celui de Karim Pakradouni. Son intention est de brosser une fresque de la seconde moitié de la guerre civile libanaise. Il dépeint donc successivement tous les jeux politico-militaires des communautés du pays, toutes les interventions régionales ou internationales de 1982 à 1991. Avec, bien sûr, un luxe de détails tout particulier sur le camp chrétien, au sein duquel il a joué un r»le important durant les deux décennies écoulées. On se prend, de ce fait, à rêver : selon son propre récit, voici un homme qui se trouve dans le cas unique d’avoir c»toyé, ou fréquemment rencontré depuis vingt ans, tous les acteurs décisifs de la scène politico-militaire proche orientale. Une liste impressionnante, qui mérite d’être détaillée :

. Johnny Abdo, colonel, chef du 2° bureau de l’armée libanaise,
. Yasser Arafat, président de l’OLP,
. Hafez al-Assad, président de la Syrie,
. Tarek Aziz, ministre des Affaires étrangères de l’Irak,
. Fadel Barrak, chef du SR irakien,
. Nabih Birri, chef d’Amal,
. Jules Boustany, colonel, chef du 2° bureau de l’armée libanaise,
. Zahi Boustany, directeur de la Sûreté générale du Liban,
. Farouk al-Chareh, ministre des AE de la Syrie,
. Antoine Dahdah, directeur de la Sûreté générale du Liban,
. Mohamed Ghanem, colonel, chef du SR syrien au Liban,
. Hani al-Hassan, dirigeant de l’OLP,
. Elie Hobeika, chef du SR des Forces Libanaises,
. Saddam Hussein, président de l’Irak,
. Abou Iyad, chef du SR de l’OLP,
. Abou Jihad, chef militaire de l’OLP,
. Ghazi Kanaan, général, chef du SR syrien au Liban,
. Simon Kassis, colonel, chef du 2° bureau de l’armée libanaise,
. Abdelhalim Khaddam, ministre des AE de la Syrie,
. Jamil Nehmé, directeur de la Sûreté générale du Liban,
. Pierre Rizk, chef du SR extérieur des Forces Libanaises,
. Ali Hassan Salameh, chef du SR du Fatah,
. Abou Tayeb, chef de la Force 17.

Familier de nombre de ces personnages et récipiendaire fréquent de leurs confidences, Pakradouni va-t-il aborder le problème crucial du terrorisme dans la guerre civile libanaise et de l’élimination brutale et systématique des dirigeants du pays, à chaque grand tournant de cette guerre ? Pour mémoire :

. Bechir Gemayel, 14 septembre 1982, président élu depuis 21 jours; un bâtiment piégé.
. Rachid Karamé, 1° juin 1987, premier ministre; un hélicoptère piégé,
. René Moawad, 28 novembre 1989, président élu depuis 17 jours; un magasin piégé sur le chemin de son cortège.
. Dany Chamoun, sa femme et deux de ses trois enfants, 21 octobre 1990; massacrés par “des inconnus”.

Eh bien non. Pas un mot sur le terrorisme et les prises d’otages. Et la mort de ces acteurs centraux de la scène politico-militaire libanaise est rappelée en une ligne avant d’être sobrement portée au compte d’une “malédiction libanaise” sur laquelle l’auteur glisse avec une exquise pudeur. Sans doute par crainte que ladite “malédiction” ne le frappe un jour...

A lire, malgré tout, pour d’intéressants portraits de Michel Aoun, Yasser Arafat, Samir Geagea, Amine Gemayel, Elie Hobeika, Saddam Hussein et Walid Joumblatt.
 

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