III – 3 Les formes de délinquance et leurs actions.

Deux catégories de mineurs violents sont apparues dans les observations:

  • mineurs violents sans délinquance,

  • mineurs délinquants avérés, multirécidivistes.

    Les classifications ainsi constatées se révèlent très proches de celles de Frechette et Leblanc, de l’Ecole de Criminologie de l’Université de Montréal.

    Ainsi dans la première catégorie, on observe des manifestations de type «incivilités»: insultes, crachats, jets de pierre, dégradations de matériel scolaire ou urbain, bagarres ou jeux dangereux dans la cour de l’école, bagarres sur le chemin de l’école, comportements non maîtrisés à la maison, tentatives d’intimidation sur les autres enfants de l’école, théâtralisation et mise en scène du moi dans toutes les occasions qui se présentent. Irrespect et actes d’insolence à l’égard des enseignants, dans la rue, dans les commerces, vis à vis des adultes en général.

    Cette catégorie d’adolescents âgés de 8 à 12 ans apparaît en difficulté de comportement social, testant sans arrêt les limites de leurs actions.

    On constate un objectif à caractère plus ludique que réellement malfaisant.

    Ces adolescents, la plupart des cas en échec scolaire et en situation de difficulté familiale, se cherchent une identité et surtout une reconnaissance sociale par le biais de manifestations d’inconduite.

    Dans la deuxième catégorie, on se trouve en présence de pré-délinquants et délinquants.

    Les agissements sont ici soutenus, diversifiés et structurés. Ils obéissent à des lois de bandes ou de groupes plus conséquents.

    L’échec scolaire est patent, il se traduit par une désertion de l’école et des actions ou séjours dans la rue ou le quartier.

    La famille, quelle soit présente ou non, ne peut guère agir comme élément modérateur.

    Seuls les passages au commissariat ou à la gendarmerie confrontent parents et adolescents devant la réalité d’une réelle opposition aux lois sociales et dans certains cas aux lois tout court.

    Les dysfonctionnements se traduisent par des actions très significatives: vols dans les grandes surfaces ou les commerces de proximité, insultes, menaces, actions d’intimidation sur les pairs, les adultes en général ou toutes personnes s’opposant à leur stratégie.

    Puis, on constate des actions de racket sur des sujets plus jeunes, des dégradations sévères sur le matériel scolaire et urbain.

    Des bagarres, razzias, règlements de compte entre bandes se déroulent fréquemment, parfois même à l’intérieur des établissements scolaires.

    Enfin, des actions de viol ou complicité de viol sur des mineures peuvent faire partie des agissements de ces jeunes délinquants.

    Ici, l’engagement dans la délinquance est délibéré, il obéit à deux objectifs parfois très liés: une anti-socialité pathologique et une recherche de gains rapides, quels que soient les procédés employés.

    Ces délinquants présentent un déséquilibre identitaire, voire même narcissique grave, les conduisant à utiliser des procédés violents de recherche de reconnaissance par le groupe de pairs.

    Suscitant la peur, l’angoisse et la violence, ils agissent par intimidation et domination sur des victimes«sidérées», vulnérables, repérées depuis longtemps et donc soumises à l’effroi et à la loi du silence.

    Les deux catégories que nous venons de décrire peuvent trouver une similitude dans celles de Frechette et Leblanc, et se répartir en deux types de délinquance:

  • une délinquance dite «commune»,

  • une délinquance dite «distinctive».

    Walgrave évoquera la théorie de la «vulnérabilité sociale», en rendant compte de la délinquance des jeunes se situant en bas de l’échelle sociale. Ceci se traduisant par les risques courus par certaines parties de la population de jeunes dans leurs contacts avec les institutions sociales.

    1. Fléchette et Leblanc. in « Délinquance et délinquants».Montréal.1987.

    Walgrave. in «Délinquance systématisée des jeunes et vulnérabilitésociale». Edition Méridiens- Kliencksiek.1992.