Menaces : inventaire, étalonnage
 
Dépérissement : les Organisations communistes combattantes (OCC)
 
Elles se nommaient Armée rouge japonaise, Weather underground (Etats-Unis), Brigades rouges, BR (Italie), Fraction armée rouge, RAF (Allemagne). Frappant "au coeur de l'Etat bourgeois", ces organisations ont fait, depuis le début des années 70, les grands titres des journaux. A leur suite sont apparues Action directe (France), les Groupes révolutionnaires antifascistes du premier octobre, GRAPO (Espagne), les Forces populaires du 25 avril (Portugal), les Cellules communistes combattantes (Belgique). En 1985 encore, de l'Espagne à l'Allemagne, de la Belgique à l'Italie, les "guérillas de l'Europe occidentale" conservaient leur capacité à frapper dans la "métropole-impérialiste-capitaliste". Puis en trois ans -l'évolution du monde renforçant les effets de la répression- les OCC se sont effondrées et sont entrées en agonie. Le 10 avril 1992, la RAF -pourtant toujours dotée d'une capacité meurtrière certaine- admettait lugubrement, par voie de communiqué, que son combat n'avait plus de sens et n'intéressait plus grand monde; que le moment était venu -sous conditions- de déposer les armes. Restent désormais les GRAPO espagnols, seuls en Europe à prôner encore la lutte armée et réduits au rôle ingrat de dernier des Mohicans.
 
Les OCC ont été l'ultime vaguelette de la déferlante marxiste-léniniste insurrectionnelle et putschiste lancée par le Komintern sur le monde, au temps de ses quatre premiers congrès (1917-1924); la dernière braise du communisme originel restée enfouie sous les cendres durant trente ans de stalinisme. A la fin des années 60 en Europe, quelques intellectuels révolutionnaires ont déniché cette braise et conçu le projet d'imposer le communisme sur notre continent par le biais de la guérilla urbaine. Le système capitaliste, disaient-ils, est désormais parvenu à son stade suprême, celui de l'impérialisme. Incapable de développer encore les forces productives, il n'a qu'une solution pour empêcher son propre effondrement : la guerre impérialiste. Quelle tâche, alors, pour les révolutionnaires ? Frapper au coeur de l'Etat capitaliste, italien, allemand ou français. Rapidement, celui-ci dévoilerait son vrai visage : celui du fascisme. Une réaction du prolétariat des pays capitalistes s'ensuivrait, bloquant la machine guerrière impérialiste. Cela, à son tour assurerait le triomphe des peuples du tiers-monde en lutte puis, à terme, celui de la révolution communiste mondiale. Bien entendu, cet échafaudage idéologique ne tenait pas debout. Mais si l'effet de certains songes est long à se dissiper; si les délires collectifs sont souvent durables, le grand jour et la réalité l'ont désormais emporté sur le rêve crépusculaire du communisme armé. Les OCC prétendaient administrer au marxisme-léninisme une cure de jouvence et lui redonner sa vigueur originelle : elles n'ont été au bout du compte qu'une manifestation de gâtisme du communisme, précédant de peu sa mort.

 

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