FRANCE


Nom officiel : République française
Continent: Europe
Superficie: 551 000 km2
Population: (1989) 56 M. d'h.
Capitale: Paris (agglomération: +10 M. d'h.)
PIB/Hab. : (1986) $ 9 445

Régime: démocratie parlementaire
Chef de l'État : François Mitterrand
Chef du gouvernement: Michel Rocard
Ligue arabe: non
Organisation de la conférence islamique: non
Liens avec la République islamique d'Iran: ambassades

% de non-musulmans 95 %
- ventilation: importante majorité catholique; minorités protestante et juive
% de musulmans +/- 5 % (deuxième religion du pays)
 vent. /100 sunnites malékites pour la plupart



[L'histoire du réseau HizbAllah-France et de la campagne d'attentats à Paris entre décembre 1985 et septembre 1986 a fait l'objet d'une étude détaillée dans L'Express du 3 février 1989, écrite par l'un des signataires de l'Atlas. Pour l'histoire du réseau européen du HizbAllah, voir p.. 100]

La communauté islamique en France n'est pas dénombrée avec précision; les chiffres oscillent entre un minimum de 2,4 et un maximum de 4 millions de fidèles. A ce sujet, diverses études permettent d'évaluer 10% les pratiquants réguliers, ceux qui fréquentent la mosquée tous les vendredis.

Il existe en France 700 associations type "loi de 1901 " dont le caractère islamique est déclaré et un millier de lieux de culte fixes et permanents.

Outre les +/- 400 000 Français musulmans (dont 40 000 français, chrétiens à l'origine et convertis), les musulmans étrangers (connus) présents en France se répartissent ainsi:

Algériens: +/- 800 000
Marocains: +/- 600 000
Tunisiens: +/- 250 000
Turcs: +/- 200 000
Pakistanais: +/- 150 000
Afrique subsaharienne: +/- 150 000

L'Islam, en France, est donc massivement africain.

Comme partout ou presque dans l'oumma, les militants de la cause musulmane en France se divisent entre ceux qui veulent réislamiser la société via l'individu et ceux qui pensent le faire par la conquête du pouvoir temporel.

Parmi les premiers - et nous ne les citons que pour mémoire - la Jama'a al-Tabligh, dite Foi et Pratique dans notre pays, où elle est implantée depuis le début de la décennie 70. Le Tabligh a été fondé en 1927, en Inde, par le descendant d'une des grandes familles souries de l'Uttar -Pradesh et ses centres principaux sont, aujourd'hui encore, dans le sous continent indien: Delhi et Lahore, notamment. Ses 3 millions de fidèles dans le monde - 3000 en France - sont des missionnaires extrêmement actifs, voulant rallier à l'Islam les musulmans d'origine gagnés par l'indifférence religieuse et corrompus par les modes de vie occidentaux (alcool, mœurs légères, etc.).

Pour cela, ils arpentent inlassablement ces "banlieues de l'Islam" dépeintes par Gilles Kepel, mais aussi les hôpitaux, dispensaires, etc., à la recherche de coreligionnaires dans le doute, dans la peine. Leur méfiance, leur hostilité, même, envers l'agitation politique sont en revanche profondes. La communauté tablighi de France est dirigée par des Tunisiens, mais ses adhérents sont pour bonne part des Marocains.

La communauté musulmane présente en France est, jusqu'à présent tout au moins, très résistante à la politisation et à l'idéologie révolutionnaire islamique. Les experts officiels estiment à un millier les propagandistes islamistes actifs et connus opérant dans notre pays; la principale communauté musulmane, l'algérienne, n'en comptant pas même une centaine en son sein.

Ainsi, les trois grandes manifestations islamistes de l'année 1989 n'ont finalement attiré que fort peu de monde:

· Manifestation contre Les Versets sataniques, de Salman Rushdie, mars 1989, Paris, place de la République: 1 500 personnes.

· Cérémonie du 40e jour suivant le décès de l'Imam Khomeini, juillet 1989, Paris: quelques centaines de personnes.

· Manifestation des "foulards islamiques", octobre 1989, Paris, à Barbès-Rochechouart: 1 000 personnes.

Malgré l'échec des rassemblements publics, quelques symptômes inquiétants sont apparus, en 1989, à l'occasion de l'affaire Rushdie. Le 23 mars, Le Nouvel Observateur publiait un sondage réalisé auprès d'un échantillon - de 500 musulmans vivant dans les agglomérations de Paris, Lyon, Marseille et parlant français. 9% des sondés se disaient solidaires de la République Islamique d'Iran et approuvaient la condamnation à mort de Rushdie; 17% d'entre eux disaient éprouver de la sympathie pour Téhéran; 21 % encourageaient les manifestants de la République; ils étaient 47% à souhaiter l'interdiction des Versets sataniques.

Plus grave pour l'avenir: s'ils étaient 14% à se déclarer "musulmans avant tout" (en opposition à "français avant tout") dans la tranche d'âge de 35 ans et plus, entre 15 et 34 ans la même catégorie faisait un véritable bond: 33%.

Ces chiffres, entre autres, ont conduit les autorités de l'État à réfléchir à la nécessité de structurer dans l'avenir une communauté éclatée en une myriade de structures associatives et soumise à des influences extérieures aussi diverses que contradictoires, allant du Maroc aux Etats du Golfe, en passant par l'Algérie, la Tunisie, l'Arabie Saoudite, l'Iran et le Pakistan.

C'est ainsi qu'en novembre 1989 le ministre de l'Intérieur, responsable des rapports de l'État avec les cultes, a créé une commission de six "sages" musulmans, élargie en mars 1990 en un Conseil de réflexion sur l'islam en France. Le projet - ambitieux - du ministre est de conduire la communauté musulmane à se fédérer, à parler d'une seule voix. Ce "consistoire musulman" ainsi créé - on n'en est pas là - le gouvernement disposerait, comme avec les catholiques, les réformés et les juifs, d'un interlocuteur unique et autorisé.

Si la communauté musulmane de France est massivement sunnite malékite, il existe également dans notre pays une minorité chi'ite, qui dispose de mosquées, notamment à Paris, Caen, Grenoble, Montpellier, Nancy et Nantes. Contrairement à leurs homologues d'Allemagne et de Grande-Bretagne, ces lieux de culte ne se sont jamais signalés par quelque activisme révolutionnaire islamique que ce soit.

Seul précédent grave à la campagne terroriste de septembre 1986: en août 1982, un Mouvement d'action islamique a revendiqué un attentat à la camionnette piégée visant l'ambassade d'Irak à Paris (6 blessés).

LES ORGANISATIONS

[Un désir de clarté dans un ensemble assez confus et en évolution constante nous a amenés à adopter un classement chronologique.]

· Association des étudiants islamiques en France (AEIF). Fondée en France dans les années 60, siège à Paris. Des sections connues à Nice, Nîmes, Strasbourg, Toulouse. S'inspire souvent des thèses de l'émir d'an-Nahda, Rachid Ghannouchi.

· Union islamique en France. Devenue, depuis, Tendance nationale-Union islamique en France (TNUIF). Fondée en 1980 ou 1981, siège à Paris. Recrute surtout dans la communauté turque; liée au Parti de la prospérité et à Milli Görus (voir Turquie, p. 207). Adhère à la FNMF (voir plus bas).

· Groupement islamique de France (GIF). Créé en décembre 1981, siège à Paris. Recrute surtout dans la communauté tunisienne; proche des thèses d'an-Nahda (voir p.201). Adhère à l'UOIF (voir plus bas).

· Union des organisations islamiques de France (UOIF). Crée en août 1983, siège à Paris. Implantée surtout dans l'est et le sud de la France, ainsi que dans la région lyonnaise, cette structure unit un nombre d'associations locales assez difficile à estimer: de 15 à 80, selon les sources. Elle est proche des thèses des Frères musulmans et de l'environnement d'an-Nahda, notamment de l'Union Générale des Tunisiens Etudiants. L'UOIF est, en théorie du moins, membre de la FNMF. Elle n'a manifesté ni contre Rushdie ni pour l'affaire des "foulards islamiques".

· Association islamique en France (AIF). Fondée en février 1984, suite à une scission survenue fin 1983 au sein de l'UIF (voir ci-dessus), siège à Paris. L'AIE, qui recrute aussi dans l'émigration turque, est la correspondante en France des structures islamistes très radicales, dirigées depuis l'Allemagne par Jamaleddin Hocaoglou, dit "Kaplan", l'ancien mufti de la ville turque d'Adana. (voir Allemagne, p. 54) Kaplan, qui est quasi totalement aligné sur les thèses de Téhéran, a quitté la Turquie après le coup d'État militaire de 1980 et rompu, en 1983, avec la branche émigration du Parti de la prospérité et avec le dirigeant de ce parti, Necmeddin Erbakan. Lors de la manifestation des "foulards islamiques" (voir plus haut), la délégation de l'AIF comptait dans ses rangs Mohamed Mouhajer, un Libanais chi'ite proche du HizbAllah, résidant en France et impliqué un moment dans l'affaire des attentats de septembre 1986 à paris.

· La Fédération nationale des musulmans de France (FNMF). Créée en décembre 1985, siège à Paris. Regroupe entre 100 et 150 associations locales, soit 40% de celles déclarées en France;
15 d'entre elles sont sur Paris. Animée par des Français de souche convertis, la FNMF prône un Islam gallican, débarrassé de toute influence étatique étrangère, maghrébine notamment. Très stricte sur le plan dogmatique, mais désireuse de ne pas effrayer les Français non musulmans, la FNMF n'a participé à aucune des manifestations islamistes de 1989. Elle rejette également les efforts du ministère de l'Intérieur pour unifier la communauté islamique, et ne participe pas au Conseil de réflexion, suscité par ce dernier en mars 1990.

· Union des jeunes musulmans. Fondée en juillet 1987, siège à Lyon. Regroupe quelques dizaines de jeunes Français musulmans issus de l'émigration, dont nombre d'étudiants ou d'universitaires, très dynamiques. L'apparition de cette association s'inscrit dans le contexte de la réislamisation des beurs de la région lyonnaise. Une tendance perceptible dès 1988 dans nombre de "cités", ZUP et notamment dans la plus célèbre, celle des Minguettes, où l'on trouve désormais 5 mosquées officielles et de nombreux lieux de prière.

En dehors de ces structures, il existe des "points de chute" de mouvements islamistes étrangers sur notre territoire, discrets ou même clandestins.

· Comme nous l'avons vu (Algérie, p. 48), le FIS a adopté en France un profil extrêmement bas. A Marseille cependant, l'association al-Ahrar lui sert de correspondant.

· Les écrits du Centre d'études et de documentation islamique de Firminy, dans la Loire, laissent supposer qu'il est proche de l'opposition islamiste irakienne (voir al-Da'oua, p. 128).

· L'Association de la jeunesse islamique marocaine, ou l'une de ses tendances (voir p. 157), fait en France un travail de propagande discret.

· Ainsi que le Parti de la libération islamique (voir Palestine, p. 170 et s. et Tunisie, p. 201 et s.), qui a diffusé un tract très militant de ton, en septembre 1990, dans la région parisienne.

 
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